samedi 26 mars 2016

Bientôt Pâques.





Frères van Eyck  L'agneau mystique


Hier j'ai vu des agneaux.  Ils sont venus vers moi comme si j'étais leur copain,  sans imaginer qu'ils approchaient du grand méchant loup. Face à leur innocence patente, je me suis dit que les explications alimentaires basées sur la  "nature humaine" (nous sommes des prédateurs ...) ou sur la culture (tradition, gastronomie ...) ne sont au fond que des prétextes pour  justifier notre voracité. En même temps, j'ai pensé  au caractère hypocrite et décadent d'une société qui, tout en restant structurellement "carnivore" (tout en se fondant sur l'exploitation directe ou indirecte des animaux) n'est  plus capable d'assumer  ses responsabilités morales.

Il ne s'agissait pas d'un argument valable, bien entendu, juste d'un vulgaire prétexte pour continuer à manger des agneaux.


Deux agneaux en mars 2016




10 commentaires:

  1. Peut-être que les agneaux savent que vous êtes très disposé à les dévorer, et sans doute êtes-vous pardonné d'avance, parce que les agneaux, c'est comme ça, mais qu'ils espèrent encore (Mt 26:39 - " Mon Père, s'il est possible, que cette coupe passe loin de moi !"). Peut-être aussi qu'ils se disent qu'en les ingérant, vous aller métaboliser leur tendresse, comme on met un tigre dans son moteur ou une peau d'ours pour devenir très fort, comme on mange l'hostie.

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    1. Je ne voudrais pas être pardonné d'avance par les agneaux, j'aimerais tout juste pourvoir les manger sans problème. Lorsqu'il y avait Dieu c'était plus facile : "Qui vous autorise à manger les agneaux?". "Eh bien, c'est le Bon Dieu, mais à certaines conditions, clairement indiquées dans la Bible, le Coran etc. ".

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  2. Cet article ne peut évidemment pas me laisser indifférente! En fait, l'homme carnivore serait perpétuellement en train de jouer une vaste "comédie de l’innocence" afin de continuer à manger et à exploiter les animaux. Une question me taraude : est-ce réellement un comportement de prédateur d'acheter et de manger de la viande sous vide dans un rayon du supermarché?
    Je pense qu'au-delà des explications basées sur la nature humaine ou sur la tradition, la culture, il y a aussi tout un discours pseudo-médical qui essaye de justifier le fait que l'homme mange des animaux ("les protéines, le fer ne se trouvent que dans la viande", "le calcium uniquement dans le lait", etc.)
    En tout cas, ces agneaux des Monts-d'Arrée sont très mignons... Espérons qu'ils soient encore vivants en ce weekend pascal!

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  3. Votre doute me paraît légitime : l'adepte contemporain de la viande sous vide est peut-être un prédateur, mais un prédateur/pantouflard, sorte d'aberration taxinomique. Le caractère inéluctable de l'alimentation carnée est vraisemblablement un prétexte, comme la distinction tout à fait arbitraire entre animaux qui disposent d'un système nerveux central (à ne plus manger) et animaux qui en sont dépourvus (dont la consommation, pour certains, resterait autorisée). Parfois, en allant encore plus loin, je m'interroge sur la légitimité de ma consommation de champignons, pois chiches et autres représentants du monde végétal. Mais ce n'est qu'une rêverie de type animiste. Les agneaux, effectivement, viennent des Monts-d'Arrée et, plus précisément de la commune de Botmeur (tant qu'à faire, balançons-les). Je reviendrai sur la question centrale ("la vaste comédie de l'innocence") parce que, comme vous savez, elle m'intéresse particulièrement.

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    1. J'aime beaucoup le concept de "prédateur pantouflard"! Je m'interroge également souvent sur la légitimité de ma consommation de végétaux et de plantes sauvages. Je me dis que je suis moi-même probablement en train de participer à une comédie de l'innocence qui sert à me déculpabiliser de couper en tranches une carotte ou de tailler quelques feuilles d'orties pour en faire une tisane...

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    2. C'est toute la question. Du point de vue alimentaire on a besoin de frontières. Il faut bien fixer des critères classant les êtres en fonction de leur "accessibilité". Mais qui établit ces critères? La biologie? La philosophie morale? Le sens commun? Vaste débat.

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  4. Mais il me semble, et je me trompe peut-être, que ce n'est pas que notre société n'est plus capable d'assumer des responsabilités morales mais qu'elle s'en invente de nouvelles.

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    1. C'est vrai. Ce qui prouve que mon argument était tout juste un prétexte pour continuer à manger les animaux.

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  5. On fait parler les animaux et on fait parler Dieu. Sauf le respect que je dois aux livres sacrés, le lévitique ne relève pas vraiment de l'idée que je me fais de l'inspiration divine. Le christianisme a permis de prendre le large par rapport à la rigidité de la Loi, en privilégiant l'esprit plutôt que la lettre. Le Coran est plus dans la tradition de l'Ancien Testament du point de vue de l'alimentation. Pour ceux qui ne sont pas concernés par le religieux, le rapport à la nourriture est autonome, en tout cas en apparence, et plus complexe : je pense que derrière la profusion des nouveaux régimes alimentaires, il y a une recherche de codifications. Nous sommes ce que nous mangeons et notre manière de le faire. Je sacralise la vie et donc ce qui me nourrit. J'aime à penser que l'animal que je mange me pardonne. Je comprends très bien qu'il en aille autrement pour tout autre et pour vous, mais Pâques valait bien une petite messe.

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  6. bonjour

    Je débarque comme un éléphant dans un magasin de...
    Mais j'apprécie sincèrement les petites remarques et autres touches légères de belles considérations morales (il en faut, non ?)

    Juste pour souligner la tendance récente à s'horrifier de la maltraitance des animaux en abattoirs : le "vegan" a de l'avenir, non ? et peut-être tant mieux... Mais en ces temps d'eurofoot c'est encore une bien faible lueur au bout du tunnel

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