jeudi 31 janvier 2019

Horizons créationnistes. Le Bon Dieu, le boucher et le dessein intelligent


 
 Maître Bertram (né vers 1340) : La Création des animaux


Chez le boucher :

- Ah, le plat de côtes, d’accord. Mais est-ce que c’est bon pour le pot-au-feu ?

- C’est fait exprès.

mardi 29 janvier 2019

Nous ne sommes pas des poissons. Encore sur Salvini, Battisti et les intellectuels



Remarque ... ! Si les "gros intellectuels" qui signent aujourd'hui contre moi  sont les mêmes qui ont signé en faveur  de cet assassin de Battisti, alors je suis encore plus convaincu d'être du bon côté et de défendre les intérêts des Italiens de bien. 

Dans mon post de l’autre jour je ne croyais pas si bien dire. En Italie circule une pétition baptisée « Nonsiamodeipesci » (nous ne sommes pas des poissons). On y prône la création d’une commission parlementaire censée enquêter  sur les noyades de masse en mer Méditerranée et sur les responsabilité du gouvernement italien. Cela rend nerveux Matteo Salvini. Ceux qui signent la pétition, pour lui, sont des « intellettualoni » (j'aurais tendance à traduire ça par "des intellectuels qui se la pètent"), les mêmes  qui ont signé une pétition en faveur de Cesare Battisti.  Bref, si on signe contre les noyades des migrants on est des intellectuels, si on est des intellectuels on est des terroristes. Cela nous rappelle d'autres époques. Vive la Patrie, vive l'Italie, vive ... 

 

dimanche 27 janvier 2019

Votre chien est stressé ? Essayez avec l’opium




 

 Chien cool
Une  entreprise suisse vient de lancer sur le marché la marihuana thérapeutique pour chiens. Elle permet de combattre l’angoisse de séparation. Le maître part en voyage et son toutou est angoissé? On file au chien de la marihuana et le problème est résolu. Le maître aussi, parfois, est angoissé.

vendredi 25 janvier 2019

Ce n’est pas moi, c’est Cochonou



 

Poisson s’apprêtant à être mangé par celui qui l’a pêché.


Le réseau est en effervescence. On vient d’apprendre que  Mark Zuckerberg, en 2011, a pris la résolution de ne manger que ce qu'il a tué de ses propres mains (chèvres, langoustes etc.). On comprend l’indignation :  les personnes sensibles et douées de bon sens, tout le monde le sait, ne mangent que ce qui  a été tué par quelqu’un d’autre.

mercredi 23 janvier 2019

Joies retrospectives (67 millons d'années et encore toutes ses dents)


 
Lot 204 - Grande dent de requin fossile géant Carcarhodon megalodon. Miocène. Circa 30 [...] en vente chez Vermot et Associés, Paris (Archéologie, Asie, Arts Premiers, Histoire Naturelle et curiosités).

On vient de trouver les dents  d’un requin préhistorique d’eau douce (la dent de l'image n'est pas la bonne). Il n’était pas très grand, il a vécu il y a 67 millions d’années. Cela nous fait plaisir. Pourquoi ? Je ne saurais pas dire, mais c'est beau d’apprendre que quelqu’un a existé alors que nous ne le savions pas. Je suis prêt à parier que dans 67 millions d’années, quand on retrouvera une de nos dents,  nous en serons tous très fiers. 

lundi 21 janvier 2019

L’innocence perdue du monde animal





Je reviens sur une vieille suggestion qui n’a pas fait de vagues. On fait semblant de ne pas s’en apercevoir, mais les animaux sont nus. Dans le passé ça pouvait encore aller. Mais aujourd’hui, puisqu’on sait qu’ils sont très proches des humains, qu’ils ont  une conscience, une morale, une libido, je trouve leur nudité de plus en plus indécente.  Je propose de rendre obligatoire le port d’un sous-vêtement. 

samedi 19 janvier 2019

La capture de Cesare Battisti, un triomphe




J’ai récemment participé  à une journée d’étude sur les safaris. Tout le monde a souligné  le caractère anachronique et indécent   de ce  genre de spectacles.

L’autre jour l’ancien militant du groupe « Proletati armati per il comunismo » Cesare Battisti a été arrêté par la police bolivienne et ramené en Italie.

Je n’ai jamais éprouvé la moindre sympathie pour Cesare Battisti et, plus largement, pour ces personnages  violents et arrogants   qui, à l’époque des Brigades Rouges,  avaient trouvé dans la lutte armée un bon prétexte pour  tirer sur quelqu’un*.

Le gouvernement italien a scénarisé le retour de Battisti en Italie comme un safari.  Dans la vidéo diffusée par le ministre Bonafede,  Battisti remplit le rôle de la bête sauvage (on l’exhibe comme un fauve),  les représentants de l’Etat jouent la part des chasseurs, et les policiers celle des rabatteurs. Une jolie petite musique agrémente la scène.  Battisti se comporte avec dignité.

En regardant les images, j’ai comparé  le regard sombre de Battisti (tant pis pour lui, encore une fois) au triomphalisme obscène de Matteo Salvini qui annonce la capture de l’ancien militant. J’ai pensé aux clandestins qui se  noient  par centaines dans les eaux méditerranéennes  et aux citoyens italiens qui, grâce à la loi qui va être promulguée, pourront flinguer leur prochain avec plus de désinvolture, à la manière des Américains**.

D’où vient la  joie de Matteo Salvini ? Du  fait d’avoir arrêté un délinquant, bien évidemment. Mais aussi, dans un pays ou le mot "intellectuel" est devenu une insulte,  d’avoir assuré à la justice un homme qui a écrit des livres.

* Ça excite et ça défoule à la fois comme dans un vrai thriller. C’était pour la lutte des classes, dans ce cas, mais ça aurait pu être au nom de Dieu,  ou pour donner une leçon aux  supporters de l ‘équipe rivale. 
** On n'arrête pas le progrès.

mercredi 16 janvier 2019

L’ontologie des nounours (encore sur l’hypocrisie)



Sauvetage d'une "Capretta di montagna". Image extraite de  La Repubblica en ligne du 9 janvier 2019

Ce que je trouve déplorable dans le discours ambiant sur la condition animale est son côté  « buonista » comme on dit en italien (angéliste). L’autre jour dans le quotidien la Repubblica qui brille par son élan pédagogique, on a sauvé de la neige non pas un chamois (comme, c'est le cas,  on peut  le voir dans la vidéo),  mais une « capretta di montagna », une petite chèvre de montagne. Le raisonnement implicite est que les petites chèvres de montagne perdues dans la neige font plus de  peine que les chamois. Quelqu’un doit avoir signalé le caractère indécent de cette manipulation « tire-larmes » à la rédaction qui s’est empressée de modifier le titre. La capretta di montagna est donc redevenue un chamois, ce qui n’enlève rien au caractère touchant  du sauvetage. Si j’exprime mon indignation c’est que ces « petites retouches » au nom de la bonne cause altèrent notre perception de la réalité. Le monde concret, avec ses nuances et ses contradictions, est simplifié et « colorié », comme le disait Roland Barthes à propos des documentaires à la Cousteau des années ’60. On passe alors du modèle « naturaliste » (c’est ainsi que l’anthropologue Philippe Descola définit l’ontologie occidentale   fondée sur l’idée qu’une frontière insurmontable nous sépare des autres espèces)* au modèle « bisounoursiste ». L'ontologie bisounoursiste  (que l'on me pardonne ce néologisme affreux) présuppose que la frontière entre les espèces n’est qu’une construction idéologique, que nous sommes tous des grands copains,  que les ennemis des ours et des loups, des tiques et des vipères seront confondus  et que tout va bien se terminer.  

* Je renvoie, pour ceux qui ne le connaîtraient pas encore, a son incontournable Par-delà nature et culture, Paris, Gallimard, 2005.

lundi 14 janvier 2019

C’est pas moi, c’est le puma (déplacements de la violence à l’époque du politiquement correct)


« Vous êtes une bande d’hypocrites », chantait mon goéland de l’autre jour.  Oui, nous sommes une bande d’hypocrites.  C’est un peu ma fixation et j’y reviens périodiquement : si la chasse est  devenue impopulaire, le spectacle de la mort animale  continue à nous enchanter **. La Repubblica du 12 janvier nous propose les 24 meilleures photos publiées cette année par National Geographic Magazine.
En couverture, immanquable, un gros félin qui poursuit un herbivore.*


*Mais l’herbivore, cette fois,  arrive à s’échapper (pour mourir de ses blessures, peut-être, un peu plus loin).

** J’aborde ces questions, entre autres, dans L’utopie de la nature  (cf. notamment le paragraphe : "Les délices du safari-photo)  et dans l’Eloquence des bêtes (cf. le chapitre "Des plaisirs du chasseurs aux souffrances de l'écologiste. Violence et iconographie")

samedi 12 janvier 2019

Brillez comme des stars : mangez de l’or







L'œuvre "America" de Maurizio Cattelan

Cette histoire de Franck Ribéry et  de son entrecôte recouverte d’or fourmille de résonances mythiques. Elle me fait penser au rameau d’or, au veau d’or, à la toison d’or (pour ne pas parler du roi Midas de Goldfinger et de Picsou). En fait, pourquoi s’aventurer jusqu’au bout de la planète comme le font certains anthropologues alors que l’Autre, dans sa surprenante étrangeté,  vit tout près de chez nous ?

jeudi 10 janvier 2019

Bêtes allégoriques



Je ne sais pas s’ils ont triché, mais c’est moi, cette année, qui ai eu la fève. C’est un toucan. Je connais plus ou moins la symbolique de l’aigle, du corbeau ou du roitelet. Pas celle du toucan. Je vais vérifier.

mardi 8 janvier 2019

Tous marxistes ?



                                       Marx (1935 environ)

Elles n’ont rien à voir avec la question animale, mais voici deux merveilles  issues des épreuves d’un cours consacré aux rapports entre science et croyance :

« Karl Marx disait  ”La croyance est l’opium des peuples ”,  ce qui voulait dire que la croyance est une chose fort importante pour l’homme ».

« Dans le monde d’aujourd’hui nous sommes chaque jour confrontés à notre existence ».

dimanche 6 janvier 2019

Sauvetages (où est passé mon requin-renard ?)




Damien Hirst. Requin tigre sous formol 

Le  requin-renard n’est pas dangereux pour les humains.  On le pêche pour exploiter sa peau, sa chair, son foie et ses nageoires.
L’autre jour, aux Philippines, un pêcheur a ramené à la rive un requin-renard. Il s’est absenté pendant un moment, probablement pour demander de l’aide. Entre temps,  des éco-touristes ont repéré le requin et l’ont remis à l’eau.   Le film du sauvetage a fait le tour du monde.
Dans un cadre néocolonial  un épisode de ce genre est  tout à fait concevable : le pêcheur autochtone a historiquement tort (il est en retard sur l’évolution de la science et de la morale, il n’a rien compris à la biodiversité) alors que le touriste, qui aime la nature et  la respecte, est du côté de la raison. 
J’imagine la même scène sur le littoral adriatique. Un bonhomme sort de l’eau avec un joli  poulpe qu’il s’apprête à mariner. Un autre bonhomme,  au nom du bien-être animal et du droit à la vie, saisit le céphalopode et le rejette dans l’eau. Ce serait le début d’une guerre civile.

vendredi 4 janvier 2019

Une vie de sapin







Je regarde le sapin de Noël qui va bientôt nous quitter et je m’interroge. C‘est un Nordmann, pour atteindre sa taille  il doit avoir vécu une dizaine d’années. Si j’avais été à sa place et j'avais pu choisir, aurais-je  préféré vivre jusqu’à dix ans ou ne pas vivre du tout ?

mercredi 2 janvier 2019

Cachez ce gibier que je ne saurais voir



 
Chasseurs d'antan fiers de montrer leurs proies*
La fin de l’année, dans l’imaginaire occidental, était associée à  l’apparition du gibier chez les bouchers et dans les casseroles. Les chasseurs se rendaient  dans la forêt et en revenaient fiers et  contents avec leur proies dodues et polychromes. Tout le monde sortait des maisons pour aller voir. Cela faisait plaisir, d’admirer ce beau gibier. C’était comme aller au Muséum d’histoire naturelle. Aujourd’hui les chasseur  font profil bas et festoient en cachette de peur d’être grondés.**
* Les sensibilités changent et ce n'est plus le cas. Je remarquerai au passage que si le capital de sympathie du chasseur diminue considérablement, la consommation de gibier dans les restaurants se porte bien.
**J’en ai parlé  vaguement le premier janvier, pendant quelques  minutes, lors de l’émission de France  Culture:  Cultures Monde Vers un nouveau pacte Homme/Animal (2/4). Chasser : une pratique en voie d’extinction ?