mercredi 31 janvier 2018

Proibitionnismes : du vrai-faux synthétique


Vraie fourrure

Il faut faire très attention lorsqu’on achète une fourrure synthétique.  En dépit de l’étiquette, parfois, c’est de la fourrure  authentique. On vient d’en saisir une grosse quantité (8.800 vêtements) dans un entrepôts de via Paolo Sarpi, le « quartier chinois » de Milan (ces étrangers … ils sont vraiment prêts à tout !).

J’en tire deux conclusion.

1) Autrefois il fallait cacher le fait que la fourrure était fausse, aujourd’hui c’est le contraire.

2) On fait son élégant en arborant un manteau en faux cadavre, on découvre plus tard que c’était du vrai.*

* http://video.corriere.it/altro-che-ecopelliccia-questo-pelo-animale-vigili-spiegano-differenza/08c5728e-eb11-11e7-aee4-bc31285a7c38   

Bisogna stare molto attenti nell’acquisto di un pelliccia sintetica. Malgrado l’etichetta, a volte, la pelliccia è autentica. Ne hanno appena sequestrato una grande quantità (8.8OO capi di vestiario)  in un magazzino di via Paolo Sarpi, il quartiere cinese di Milano (questi stranieri … sono veramente capaci di tutto !).
Ne traggo tre conclusioni.
1)  Una volta bisognava nascondere il fatto  che la pelliccia era falsa, oggi è il contrario.
2) Uno fa l’elegante esibendo un cappotto in falso cadavere, poi scopre che il cadavere era vero.
3) Milanesi, e alcuni in particolare, non perdete d’occhio i vostri gatti. 

lundi 29 janvier 2018

Il y a une bête dans ma voiture



Je me demande pourquoi si dans  la voiture qui me précède il y a un animal  - ce qui est d’ailleurs normal, diraient les antispécistes -  ma manière de conduire devrait changer.

" Attention, école avec trois cent écoliers ! " . " Bon, alors je ralentis. Par contre s'il n'y en avait eu qu'une trentaine ... ".


Mi chiedo perché se nella macchina che mi precede c’è un animale - il che  del resto è  normale, direbbero gli animalisti - il mio modo di guidare dovrebbe cambiare. “Attenzione, scuola con trecento scolari” “Allora rallento. Se fossero stati appena una trentina, invece ... nessuna pietà”.  

samedi 27 janvier 2018

L'étiquette a son poids (le statut incertain du buddleia)



Résultat de recherche d'images pour "braconnier"


Aujourd'hui on les appelle braconniers, mais il s'agit parfois de chasseurs-cueilleurs qui continuent à chasser comme ils l'ont toujours fait. Pour eux c'est de la chasse, pour les gestionnaires des parcs naturels c'est du braconnage*. Il en va de même pour le buddleia qui vit dans mon jardin (j'en parle de temps en temps, lorsque je n'ai vraiment rien à raconter). Il est persuadé d'être une plante ornementale mais pour le Ministère de l'Environnement c’est une espèce invasive. Depuis que je l'ai su  je le regarde  différemment, comme on regarde  un délinquant.  Je pense qu'il en est au courant. Un jour il m'a dit ( enfin je crois) : "Écoute, on m'a acheté chez un pépiniériste, j'ai des belles fleures mauves, je suis entouré par toutes sortes de papillons, de quoi te plains-tu?" Je lui ai répondu : "Tu as tes qualités, c'est vrai, mais tu portes atteinte à la biodiversité et plus largement  à l'ordre naturel". Ça sonnait tellement bien que je n'ai rien ajouté. En rentrant  à la maison j'avais néanmoins le sentiment d’avoir dit une grosse bêtise. 

* Je me réfère à de l'Afrique, les chasseur-cueilleurs de chez nous ayant disparu depuis un bon moment.


Li chiamano bracconieri, oggi, ma si tratta a volte di cacciatori-raccoglitori che continuano a cacciare come hanno sempre fatto. Per loro è della caccia, per i gestori dei parchi naturali è del bracconaggio ( mi riferisco all'Africa, i cacciatori-raccoglitori, da noi, essendo spariti da parecchio tempo). Lo stesso vale per la buddleia che vive nel mio giardino (ne parlo di tanto in tanto, quando non ho veramente niente da raccontare). È convinta di essere una pianta ornamentale  ma secondo il Ministero dell'Ambiente fa parte delle specie invasive. Da quando lo ho saputo la guardo in modo diverso, come si guarda un delinquente. Penso che ne sia al corrente. E sono quasi sicuro che mi abbia detto : "Senti, mi hanno comperato in un vivaio, ho dei bei fiori color  vinaccia, sono circondata da ogni tipo di farfalle, di cosa ti lamenti? Le ho risposto : "Sì, hai le tue qualità, ma metti in pericolo l'ordine naturale". Suonava così bene che mi sono fermato lì, ma sono rientrato in casa con la sensazione di aver detto una stupidaggine.  

jeudi 25 janvier 2018

Ciel, un cerf dans mon jardin!


Maison avec jardin attendant l'arrivée d'un cerf

Ce n'est plus un fait insolite, désormais c'est une tradition. Les chiens poursuivent un cerf qui se réfugie dans le jardin d'un particulier.  Parfois les chasseurs parviennent à le tuer  (je parle du cerf), ce qui nuit gravement à leur réputation.  Parfois les riverains arrivent à sauver l'animal, en montrant ainsi leur supériorité morale sur les chasseurs*.

Le monde des cervidés a considérablement changé. Autrefois, pour échapper aux chiens, ils s'enfuyaient au cœur  du sauvage. Aujourd'hui ils s'enfuient au cœur du domestique.

*  On m'a fait remarquer qu'il serait néanmoins intéressant de savoir ce qu'il y avait dans l'assiette de ces objecteurs de conscience le jour du réveillon.


Non è più un fatto insolito, ormai è una tradizione. I cani inseguono un cervo che si rifugia nel giardino di un privato cittadino. A volte i cacciatori riescono a ucciderlo (parlo del cervo), il che nuoce alla loro reputazione  già gravemente compromessa. A volte, invece, i residenti riescono a salvarlo, mostrando così la loro superiorità morale sui cacciatori. Il mondo dei cervidi è cambiato molto. Una volta, per scappare ai cani, si addentravano nel cuore della foresta. Oggi si addentrano nel cuore della città.

mardi 23 janvier 2018

Types humains (Paroles, paroles)



"S'il devait mourir avant moi, ce que j'espère, je n'en prendrai pas d'autre. Si je meurs avant lui, je demanderai au vétérinaire qu'on parte ensemble. Il le piquera afin qu'il meure dans mes bras. Je préfère ça plutôt que de savoir qu'il se laissera mourir sur ma tombe avec tant de souffrance (...) Je préfère ça plutôt que de savoir qu'il se laissera mourir sur ma tombe".  (...) Je veux être enterré au milieu de mes bêtes”.

On a largement commenté  ce passage d’Alain Delon parlant de son chien. Dans son genre c’est un chef-d’œuvre qui donne immédiatement envie d’ajouter quelques insanités. Par son emphase, sa passion pour les animaux et sa déception à l'égard du genre humain, Delon me rappelle une autre célébrité.


« Se dovesse morire prima di me, è quello che spero, non ne prenderei altri. Se muoio prima di lui, domanderò al veterinario di farlo partire insieme a me. Gli farà un’iniezione perché possa morire tra le mie braccia. Preferisco questo piuttosto di sapere che si lascerà morire sulla mia tomba con tanta sofferenza (…) voglio essere sotterrato a fianco delle mie bestie ». Questo passaggio di Alain Delon a proposito del suo cane è già stato ampiamente commentato. È un’opera d’arte, nel suo genere, che fa subito venir voglia di aggiungere qualche scempiaggine. Nella sua enfasi,  la sua passione per gli animali e il disincanto nei confronti del genere umano Delon mi ricorda un’altra celebrità.

dimanche 21 janvier 2018

Manger avec les uns, manger contre les autres. 4) Folklore moderne : faire son intéressant en jouant sur le registre alimentaire



On est ce que l'on mange. Autruche se prenant pour un châtelain

Et nous voilà à la fin de notre séquence. Manger de l’ours chez les membres de la Ligue du Nord est donc un geste identitaire et folklorique à la fois. Mais le fait de fréquenter des restaurants branchés qui proposent des larves de Ténébrion meunier et des scorpions caramélisés n’est pas moins folklorique. Et cela dénote tout autant. D’autres stratégies propres à notre société permettent de faire son intéressant en jouant sur le registre alimentaire.  Au lieu de manger certains plats, on peut les refuser de façon spectaculaire : « Moi, je ne mange pas de cadavres ». On  peut même ne rien manger du tout. C’est le chantage masochiste, comme l’appellent les psychanalystes : « Je me laisse dépérir, je ne viens pas à table, et par cette rupture de la commensalité je vous empêche de manger en rond,  je vous oblige à vous occuper de moi ».

Parfois j’ai presque l’impression (mais c’est du délire, bien entendu) que ceux qui ne mangent pas de viande le font à des fins démonstratives : « Vous mangez de la viande ? Eh bien moi, alors, je ne la mangerai pas ».

Ed eccoci alla fine della sequenza. Tra i membri della Lega Nord mangiare dell’orso è dunque un gesto  folcloristico-identitario. Ma il fatto di frequentare dei ristoranti alla moda che propongono larve di coleotteri o scorpioni caramellati non è meno folcloristico. E denota altrettanto. Altre strategie permettono di mettersi in mostra giocando sul registro alimentare. Invece di mangiare certi piatti, uno può rifiutarli in modo spettacolare : “Io, cari miei, non mangio cadaveri”. Ma può anche non mangiare del tutto. È il ricatto masochista : “Mi lascio deperire, non vengo più a tavola e tramite questa rottura della commensalità vi impedisco di mangiare tranquillamente, vi obbligo ad occuparvi di me”.  A volte ho quasi l’impressione (ma è un delirio, beninteso), che quelli che non mangiano carne lo facciano a fini dimostrativi : “Mangiate della carne? Ebbene, allora io non ne mangerò”.

Je profite de cet espace pour annoncer la prochaine séance du 


Séminaire EHESS-IIAC
L’appropriation de la nature entre remords et mauvaise foi : la prédation comme spectacle (2e année)

Le 22 janvier 2018 de 15 h à 17 h (salle 10, 105 bd Raspail 75006 Paris)


Anne-Marie Brisebarre, Directrice de recherche émérite au CNRS
Laboratoire d’anthropologie sociale
Collège de France

Les éleveurs ovins caussenards et cévenols face aux loups

Depuis 2011, inscription au patrimoine de l'humanité des paysages culturels de l'agropastoralisme des Causses et des Cévennes et, coïncidence, réinstallation des loups sur ce territoire, j'effectue une veille sur le "dossier loup" dans le cadre du conseil scientifique de l’Entente interdépartementale Causses & Cévennes qui gère l’inscription de ce "Bien" incluant le territoire du parc national des Cévennes et une partie du parc régional des Grands Causses.
Dans les quatre départements du sud du Massif Central concernés (Aveyron, Gard, Hérault, Lozère), divers systèmes d’élevage ovin se côtoient (sédentaires ou transhumants, pour la production de lait ou de viande), tous fondés sur le parcours extensif des troupeaux, donc particulièrement exposés à la prédation.
Mon intervention, appuyée sur les relations entretenues avec les éleveurs (sur le terrain, par mail et téléphone), mais aussi sur le recueil de très nombreux documents concernant les attaques par les loups (courriers, rapports, articles de presse…), montrera comment, confrontés à une gestion administrative jugée insatisfaisante de la prédation et à des accusations de "mauvaises pratiques professionnelles" entretenues par les associations pro-loup, des éleveurs se sont regroupés pour agir, dans la légalité, pour la défense de leurs brebis et de leur métier.

vendredi 19 janvier 2018

Manger avec les uns, manger contre les autres. 3) Amateurs de langues et de cervelles


En Vénétie, j’ai croisé des mangeurs de langues et de cervelles de gibier : « On les ramasse au cours de l’année, on les stocke dans le congélateur et après on fait un repas. C’est le  diner des experts . C’est pas le chasseur du dimanche qui pourrait se permettre un repas pareil ». D’autres, pour afficher leur différence, mangent des bêtes protégées. Il y a quelques temps, par exemple, les membres de la Ligue du Nord ont organisé un festin à base d’ours. C’était strictement interdit et les ripailles, même si la viande avait été régulièrement achetée en Slovénie, ont été interrompues par les forces de l’ordre. Si ces fiers représentants de l’identité régionale avaient bravé les lois de l’État, ce n’était pas par gourmandise, mais pour se démarquer des écologistes et autres amis du plantigrade.


Nel Veneto ho conosciuto dei mangiatori di lingue e di cervelli di animali selvatici : « Li raccogliamo durante dell’anno, li mettiamo nel congelatore e poi facciamo una cena. È la cena degli esperti. Non è certo il cacciatore della domenica che può permettersi un pasto del genere ». Altri, per mostrare la loro differenza, mangiano degli animali protetti. Tempo fa, per esempio, la Lega Nord ha organizzato une banchetto a base di orso. Era strettamente vietato e l’agape, anche se la carne era stata regolarmente acquistata in Slovenia, è stata interrotta dalle forze dell’ordine. Se questi baldi rappresentanti dell’identità regionale hanno trasgredito le leggi dello Stato, non è per ghiottoneria, ma per smarcarsi dagli ecologisti e altri amici del plantigrado.

mercredi 17 janvier 2018

Manger avec les uns, manger contre les autres. 2) Ingestions identitaires



Alpes de Vénétie, Après une battue au renard dans les années '50 (archive S. Dalla Bernardina)

Manger, on le sait, dénote et connote. C’est le côté identitaire de l’acte nutritionnel, qui peut être délibéré (« je mange du beurre salé pour revendiquer ma bretonnitude ») ou involontaire (« il mange du beurre salé parce qu’il est Breton »). J’ai connu plusieurs types de mangeurs identitaires. Dans les Alpes piémontaises j’ai rencontré des mangeurs de renards.  Lorsqu’ils en avaient pris deux ou trois, ils se retrouvaient entre copains – rien que des hommes – et se livraient à des festins « initiatiques ». C’était une sorte d’ordalie : « Ça sent fort mais nous on aime bien. Alors que les autres … ces petites natures …». Selon l’ethnologue Emilie Mariat-Roy, un peuple entier se livre à ce même genre de consommations sélectives. Il s’agit des Islandais. Une fois par an, les Islandais authentiques mangent la chair d’un requin faisandé, particulièrement puant, pour célébrer leur identité nationale et le retour périodique des ancêtres*.

* Chaque communauté, naturellement, a sa gourmandise bien puante qui permet d'identifier les "vrais" et éloigner "faux".


Mangiare, si sa, denota e connota. È il lato identitario dell’atto nutritivo, che può essere deliberato (« mangio del burro salato per rivendicare la mia « bretonnitudine », o involontario (« Mangia del burro salato perché è Bretone »). Ho conosciuto vari tipi di mangiatore identitario. Nelle Alpi piemontesi ho incontrato dei mangiatori di volpi. Quando ne avevano prese due o tre, si ritrovavano a casa di un amico – solo maschi – e organizzavano una bella festa “iniziatica”. Era una specie di ordalia : “Ha un odore forte ma a noi piace. Invece agli altri … delle donnicciole …”.  Secondo l’etnologa Emilie Mariat-Roy, un intero popolo pratica questo genere di ingestioni selettive. Si tratta degli Islandesi. Una volta all’anno, gli Islandesi autentici mangiano le carni di un pescecane frollato particolarmente puzzolente per celebrare la loro identità nazionale e il ritorno degli antenati.

lundi 15 janvier 2018

Manger avec les uns, manger contre les autres. 1) La fin du modèle sacrificiel


Commensalité bretonne 

Je profite du fait que ce blog est un espace ludique et partisan pour proposer, coupé en tranches comme un saucisson, un article qui néglige plusieurs facteurs  susceptibles d’expliquer nos comportements alimentaires (et évoque par contre  des arguments qu’il ne faudrait pas mentionner). 

Il était rassurant, autrefois, de se réunir autour de la victime sacrificielle. On partageait équitablement la responsabilité de son assassinat, et par la mise en commun de ses restes - d’où le terme communion - on se sentait tous pareils.  On faisait corps unique contre ceux qui, pour une raison ou pour une autre, ne participaient pas au  banquet sacrificiel. Aujourd’hui c’est moins courant. Le boulimique mange en cachette. L’anorexique ne mange pas. L’orthorexique se présente à table avec ses friandises à lui parce que ce qui traîne dans l’assiette de son voisin est à coup sûr malsain. Tout cela singularise les mangeurs et remet en cause la commensalité.

Approfitto del fatto che questo blog è uno spazio ludico e partigiano  per proporre, tagliato a  fette come un salame, un articolo che trascura numerosi fattori capaci  di spiegare i nostri comportamenti alimentari (ed evoca invece, il che è ancora peggio, degli argomenti  che andrebbero passati sotto silenzio).

Mangiare con gli uni, mangiare contro gli altri.

Era rassicurante, una volta, riunirsi intorno alla vittima sacrificale. La responsabilità del suo assassinio veniva condivisa  e grazie alla messa in comune dei suoi resti – d’onde il termine comunione – ci si sentiva tutti uguali. Si faceva corpo unico contro quelli che, per una ragione o per l’altra, non partecipavano al banchetto sacrificale. Oggi è meno frequente. Il bulimico mangia di nascosto. L’anoressico non mangia. L’ortoressico si presenta a tavola con le proprie prelibatezze perché il cibo che giace sul piatto del vicino è sicuramente malsano. Tutto questo singolarizza il mangiatore e mette in discussione la commensalità.

samedi 13 janvier 2018

Nouveaux horizons du sacré. Peut-on encore plaisanter sur les habitudes alimentaires ?


Image réductrice et partisane (pas scientifique du tout)

Est-ce que Jésus avait le sens de l’humour ?  Qui sait ? Et le Bon Dieu ? C’est possible, mais les commentateurs ne l’ont pas trop remarqué. Dans d’autres civilisations il existe bien des démiurges facétieux, grivois, ironiques, même clownesques. Mais pas chez nous. Lorsqu’on a une mission à accomplir on ne plaisante pas. Et d’ailleurs, est-ce que Superman a le sens de l’humour ?  La tradition italienne connaît le dicton « Scherza coi fanti ma lascia stare i santi » : Il ne faut pas mêler les choses sacrées avec les profanes : (littéralement : «Plaisante avec les valets  mais laisse tranquilles les saints»)*.

Certains pensent  que dans un monde laïcisé comme le nôtre on a le droit de plaisanter sur tout, même sur les Saints. Eh bien,  ce n’est pas vrai.  On peut plaisanter sur les chasseurs et sur les toréros, certes. Mais peut-on ironiser avec autant de souplesse sur les végétariens,  sur les défenseurs de la cause animale, sur  tous ceux qui, en exhibant la radicalité de leurs choix alimentaires, nous empêchent de « manger en rond »  ? De moins en moins. 

Les saints sont toujours là. Ils ont juste changé de masque.

*Cela vient de  la Tosca de Puccini


Gesù aveva il senso dell’umorismo ? Chi lo sa ? E il Buon Dio ? Può darsi, ma i commentatori non insistono molto su questo punto. In altre società esistono demiurgi burloni, salaci, ironici, persino clowneschi. Ma da noi no. Quando uno ha una missione da compiere non sta lì a scherzare. Superman, del resto, non brilla per senso dell’umorismo.   La tradizione italiana conosce il detto : “Scherza coi fanti ma lascia stare i santi”.  Potremmo pensare che in un mondo laicizzato come il nostro si abbia ormai il diritto di scherzare su qualsiasi cosa. Però non è vero. Possiamo scherzare sui cacciatori e i toreri, certo. Ma possiamo ironizzare con altrettanta disinvoltura sui vegetariani, sui difensori della causa animale, su quelli che, esibendo il radicalismo delle loro scelte alimentari, ci impediscono di mangiare un boccone in santa pace? Sempre meno. I santi sono sempre al loro posto. Hanno solo cambiato maschera.

jeudi 11 janvier 2018

Du Bourdieu dans le bar à vin



On pense souvent que lorsqu’on connaît le métier de quelqu’un  on arrive tant bien que mal à imaginer ses goûts  en matière de musique, de gastronomie etc. Ce jour-là ils étaient trois au banc de l’enoteca (bar à vin).   Ils parlaient le dialecte du coin. J’en connaissais un, un homme  tranquille et vigoureux qui travaillait dans l’abattoir de la ville. On disait qu’il était capable de tuer une veau d’un coup de poing, mais il ne s’en vantait pas trop. « Que buvez-vous ? demanda le barman ». «Un prosecco, dit le premier »* « Moi aussi ajouta le deuxième ». « Et moi, dit le tueur de veaux sur un ton distingué, un perrierino (une petit Perrier) ». J'ignorais que les Italiens avaient tant de familiarité avec les perrierini.

·     * Vin pétillant italien de plus en plus à la mode dont on trouve  des versions (très souvent imbuvables) dans les supermarchés français.


Crediamo  spesso che, conoscendo il mestiere di qualcuno, è facile immaginare i suoi gusti in materia di musica, gastronomia ecc. Quel giorno, appoggiati al banco dell’enoteca erano in tre. Parlavano il dialetto locale. Ne conoscevo uno, un uomo tranquillo e vigoroso che lavorava nel macello cittadino. Pare che fosse capace di uccidere un vitello con un pugno, ma non se ne vantava troppo. « Cosa vi servo ? »,  chiese il barista. « A me un prosecco », disse il primo. « Anche a me », aggiunse il secondo.   « E a me, disse l’uccisore di vitelli con un tono distinto, un perrierino ». Non sapevo che gli Italiani avessero tanta familiarità con i perrierini.

mardi 9 janvier 2018

Autour des croyances et de leur explication scientifique


Publicité vestimentaire issue d’un catalogue qui traîne à la maison (EMP, Coll. Gothicana, 36,99 euros effet tailladé).

- Certes que ce tabou du porc ... c'est pas très rationnel.

- Bien sûr que c'est rationnel.  Tu n'as jamais entendu parler du ver solitaire qui se transmet du porc à l'homme? Derrière les croyances il y a toujours une raison. 

- Oui, je sais.  Tu sais d'où ça vient l'histoire des sirènes ? Lorsque tu es un marin, et que tu passes des mois entiers sur un bateau, tu commences à voir des femmes partout. Il y en a un qui dit : " Regarde là bas, sur le rocher, il y a plein de phoques". Et l'autre répond : " Mais non, regarde mieux, c'est pas des phoques".

- Certo che questo tabù del maiale ... non è che sia molto razionale.

- No, è spiegabilissimo. Non hai mai sentito parlare della tenia che si trasmette dal maiale all'uomo? Dietro alle credenze c'è sempre una ragione.


- Ma sì, lo so. Sai da dove viene la storia delle sirene? Quando sei un marinaio, e passi dei mesi interi sulla nave, cominci a vedere delle donne dappertutto.  Ce n'è uno che dice : "Guarda laggiù, sullo scoglio, c'è un mucchio di foche". E l'altro risponde : Ma no, guarda meglio, non sono foche.

dimanche 7 janvier 2018

Marina Ripa di Meana



 
Image empruntée au périodique Panorama (5 janvier)

Dans son militantisme mondain pour la cause animale elle était une sorte de Brigitte Bardot à l’italienne. J’ai parfois ironisé sur ses stratégies publicitaires hautes en couleur. Aujourd’hui j’ai un léger regret.

Nel suo militantismo mondano per la causa animale era una sorta di Brigitte Bardot all’italiana. Mi è capitato di ironizzare sulle sue strategie pubblicitarie che definirei pittoresche. Oggi ho un leggero rimorso.


samedi 6 janvier 2018

La rhétorique du « pseudo »


Pablo Picasso, 1935. Image de propagande conférant à  la corrida une dimension épique

« La corrida nous est présentée par ses défenseurs comme la mise en scène d’un combat équitable entre l’homme et la bête (ou un truc du genre, je dois avouer que je m’y perds parfois dans leurs explications pseudo-intellos, sur la dimension artistique de la chose »  (Aymeric Caron, Antispéciste. Reconcilier l’humain, l’animal, la nature, Paris, Points, 2017, p. 190).

D’un côté j’aurais envie de partager ce point de vue : des arguments tels que la « beauté du geste », le « don et contredon », la « fonction sacrificielle », sont en fait au cœur de la rhétorique cynégétique et tauromachique. Ils servent à rendre « dicibles » et « visibles » des séquences difficiles à consommer sans mode d'emploi.  D’un autre côté je suis troublé par l’emploi désinvolte du préfixe « pseudo » utilisé par cet ambassadeur du mouvement antispéciste.

En poussant un peu plus loin cette manière de présenter les choses  on pourrait qualifier de « pseudo » non seulement les intellectuels qui s’interrogent sur le sens de la chasse ou de la corrida, mais également les artistes qui s’en sont inspirés  (les pseudo-tableaux de Cranac, de Courbet, de Goya, de Picasso …),  autant d’œuvres idéologiques qui nous cachent, en l’esthétisant, l’insupportable gratuité de l’acte sanglant.  

Je saisis l’occasion pour annoncer la prochaine séance de notre pseudo-séminaire (ouvert au pseudo-public). J’y reçois le pseudo-ethnologue Frédéric Saumade qui nous livrera ses pseudo-réflexions autour du pseudo-thème suivant : Déclinaisons structurales sur la violence, la mort et la reproduction dans les jeux taurins de l'Europe du Sud-Ouest et de l'Amérique du Nord, ou comment la plus-value se constitue sur les marges indésirables de la normalité sociale


Voici le résumé de l'intervention : 

Dans l’arène, la corrida projette un fantasme nobiliaire lié à une esthétique de l’ancienneté et de la mort, qui fait scandale précisément en ce qu’elle pousse jusqu’à l’intolérable la quête dans ce que Baudrillard appelait les « réserves des signes emblématiques du passé antérieur à la production industrielle ». A l’idéologie de la noblesse de la race et des lignages des taureaux de combat, correspond une idéologie exégétique du « sacrifice », également défendue par certains ethnologues prestigieux, en dépit des évidences sur l’absence complète de dimension oblative dans un spectacle qui présente toutes les caractéristiques d’un commerce de luxe.
En fait il s’agit d’une économie de la mort et de la reproduction qui met en acte, et en scène (Orson Welles disait que le torero était « un acteur à qui il arrive des choses réelles »), ce que le marché capitaliste cherche à développer sous la forme du signe pur afin de masquer le scandale que la corrida révèle avec éclat : la mise en valeur, dans toute son ambiguïté, du projet prométhéen des contrôles par l’humain des cycles naturels de la vie et de la mort à partir de la Révolution néolithique, de la maîtrise de l’élevage et des développements historiques corollaires du marché, de la colonisation et de l’esclavage. Mais cette économie de la mort et de la reproduction ne peut se comprendre, sur un plan anthropologique, que par la comparaison entre la corrida, forme canonique, et les autres formes de jeux taurins, conçues entre l’Europe du sud-ouest et le continent américain à partir de l’époque coloniale, qui excluent du spectacle la mort du taureau, tout en faisant écho à la première dans les manières de concevoir la relation signifiante de l’homme et de l’animal d’élevage. De cet effort comparatif se déploie un vaste système de transformations où se donnent à voir toutes les virtualités de la création de la valeur et du développement d’une plus-value sur la base d’une narration (mythe de l’histoire) qui transforme les marges indésirables de la société (acteurs d’origines sociales stigmatisées, animaux dangereux, « sauvages », impropres au travail productif) en gages de noblesse et d’hérédité à partir de la mise en scène d’une mort qui les rend immortels, « patrimoniaux » comme on dirait aujourd’hui.

« La corrida ci è presentata dai suoi difensori come la messa in scena di un combattimento alla pari tra l’uomo e la bestia (o un affare del genere, devo confessare che mi perdo certe volte nelle loro spiegazioni pseudo-initellettuali sulla dimensione artistica della cosa). (Aymeric Caron, Antispéciste. Reconcilier l’humain, l’animal, la nature, p. 190). Da un lato, avrei voglia di condividere questo punto di vista : argomenti quali “la bellezza del gesto”, il “dono e contro-dono”, “la funzione sacrificale” sono infatti al centro della retorica della caccia e della corrida. Servono a rendere dicibili e visibili delle sequenze altrimenti improponibili. D’altro lato sono turbato dal prefisso “pseudo” utilizzato da questo ambasciatore del movimento animalista.  Spingendo giusto un po’ più in là questa maniera di presentare le cose potremmo qualificare come “pseudo” non solo gli intellettuali che si interrogano sul senso della caccia o della corrida, ma anche gli artisti che se ne sono ispirati (i pseudo-quadri di Cranac, di Courbet, di Goya, di Picasso …), altrettante opere ideologiche che ci nascondono, estetizzandola, l’insopportabile gratuità di una messa a morte. Colgo l’occasione per annunciare la prossima seduta del nostro pseudo-seminario (aperto allo pseudo-pubblico). Inviterò lo pseudo-etnologo Frédéric Saumade che ci trasmetterà le sue pseudo-riflessioni intorno allo pseudo-tema seguente : Declinazioni strutturali sulla violenza, la morte e la riproduzione nei giochi taurini dell’Europa del Sud-Ovest e dell’America del Nord, ovvero come il plusvalore si costituisce sui margini indesiderabili della normalità sociale.



vendredi 5 janvier 2018

Chasse aux pare-brises dans le Morbihan


C’este tout récent. Un chien de chasse sort soudainement du bois. Un automobiliste l’écrase. Le propriétaire du chien, un jeune homme de 17 ans, vise la vitre arrière de la voiture et la défonce d’un coup de fusil. L’automobiliste s’enfuit. Le tireur est présenté à un juge pour enfants.

Cherchons à imaginer la stratégie de l’avocat de la défense. 

1) « Un sanglier s’était interposé entre le chasseur et la voiture ».
2) « Cela prouve à quel point le garçon aimait son chien ».
3) « C’est un brave garçon bien de chez nous, impulsif et passionné. Regardez plutôt ce qui se passe dans les villes, avec tous ces drogués ».
4) « L’automobiliste ne s’était pas  arrêté, il fallait bien faire quelque chose ». 
5) « L’automobiliste avait la jupe trop courte ».

È successo da poco. Un cane da caccia esce improvvisamente dal bosco. Un automobilista lo schiaccia. Il proprietario del cane, un giovanotto di 17 anni, mira al vetro posteriore e lo sfonda con un colpo di fucile. L’automobilista fugge. 
Cerchiamo di immaginare la strategia della difesa : 
1) « Un cinghiale  si era frapposto tra il cacciatore e l’automobile ».
2) « Questo prova a che punto il ragazzo amasse il cane ».
3) « È un bravo ragazzo delle nostre parti, impulsivo e appassionato. Quardate piuttosto cosa succede in città, con tutti quei drogati ».
4) « L’automobilista non si era fermato, bisognava pur fare qualcosa ». 
5) « L’automobilista aveva la gonna troppo corta ».