lundi 13 février 2017

Truismes. Pourquoi reproduire le réel?


 Tableau de Magritte montrant sa propre inutilité

- "Les animaux sont mes amis ...  et moi je ne mange pas mes amis' (George Bernard Shaw).  Super.

- "Quand il est dur d'avancer, ce sont les durs qui avancent" (John Kennedy)". Glorieux, brillant.  

- Question que j'ai posée, il y a quelques jours,  dans une salle de réunion inondée par un pâle soleil finistérien : "A partir de ce qui vient d'être dit j'ai néanmoins un peu de mal à comprendre l'aversion de Platon pour les œuvres d'art"*.

- Réponse (chargée d'une certaine véhémence) : "C'est tellement évident : pourquoi reproduire des fleurs lorsqu'elles existent déjà?". De nombreux auditeurs semblent apprécier.


On ne songe pas assez, je trouve, au pouvoir enchanteur des lapalissades. Cela franchit le champ du politique. La démagogie, on le sait, se nourrit de truismes. La recherche et l'enseignement aussi. Ce qui compte, dans ce domaine, est moins le sens du propos que son ton. Tout dépend de l'assurance avec laquelle la lapalissade est proférée.


* Et ceci même si je connais depuis mon adolescence le topos de l' "art comme copie du réel" que les "littéraires" italiens découvrent au "gymnase", redécouvrent au lycée et retrouvent, en plat de résistance,  à l'université.

7 commentaires:

  1. Le québécois, plus dubitatif, dit plutôt : "C'poyvidin !"

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  2. Je regrette quant à moi que l'intervention de Véronique Dassié ait été un peu éclipsée, il me semble que l'on avait là un exemple très intéressant de ce qu'est une démarche ethnologique à la fois sensible et étayée par des faits concrets. Mais les ethnologues n'étaient peut-être pas en majorité dans l'assemblée.

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  3. Intéressante, la remarque sur les fleurs. Cela n'était pas aussi évident pour les Décadents! Je me permets de citer un extrait du Journal des Goncourt :
    "Ce chrysanthème japonais est une fleur, qui n’a rien du chrysanthème bourgeois, aux pétales raides et géométriques de la reine-marguerite. Il y en a, un blanc d’un chiffonnage soyeux extraordinaire, un rose d’un violacé maladif tout à fait charmant, un d’un rouge capucine au cœur de vieil or.
    Elles ont ces plantes à hautes tiges, avec leurs houppes à la façon de certains échassiers, et en leurs penchements et en leur langueur, quelque chose de séducteur, d’attractif des produits originaux excentriques, paradoxaux de la nature. Puis leurs couleurs ne sont pas tout à fait des couleurs de fleurs ordinaires, de fleurs du bon Dieu ; ce sont des tons brisés, des tons rompus, des tons passés, des tons artistiques de tentures et de meubles, des coloriages d’intérieurs de civilisations décadentes." (Dimanche 1er novembre 1885)

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    1. "Il assimilait volontiers le magasin d'un horticulteur à un microcosme où étaient représentées toutes les catégories de la société : les fleurs pauvres et canailles, les fleurs de bouge, qui ne sont dans leur vrai milieu que lorsqu'elles reposent sur des rebords de mansardes, les racines tassées dans des boîtes de lait et de vieilles terrines, la giroflée, par exemple ; les fleurs prétentieuses, convenues, dont la place est seulement dans des che-pots de porcelaine peints par des jeunes filles, telles que la rose ; enfin les fleurs de haute lignée telles que les orchidées, délicates et charmantes, palpitantes et frileuses ; les fleurs exotiques, exilées à Paris, au chaud, dans des palais de verre ; les princesses du règne végétal, vivant à l'écart, n'ayant plus rien de commun avec les plantes de la rue et les flores bourgeoises." ( J.-K. Huysmans A rebours 1884)
      Quel beau texte que cet extrait du Journal des Goncourt !
      Il yavait de la sensibilité chez les Décadents, n'y en aurait-il pas chez des Universitaires ?

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    2. Ah! Merci d'avoir cité ce passage de Huysmans!! Il faudrait d'ailleurs citer tout le chapitre VIII. Je suis certaine qu'en cherchant bien, on peut trouver des universitaires sensibles... Je l'espère, du moins!

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  4. Anne Sylvestre rend hommage aux autres, "les gens qui doutent". Ce ne doit pas être la seule, si l'assurance est clivante, il doit y avoir ceux qui sont séduits et convaincus par la véhémence d'une lapalissade, et ceux qui en sont embarrassés.

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  5. A propos de chrysanthèmes japonais, des habitants du Royaume du Soleil Levant viennent encore fleurir la tombe de Vincent Van Gogh, près de celle de son cher frère Théo, à Auvers sur Oise.
    Je pense à son acharnement à rendre à la beauté de la nature ce qu'elle lui donnait. C'est peut-être une semblable gratitude qui animait les artistes du Paléolithique (dont la finesse du dessin rappelle les estampes japonaises qui ont beaucoup influencé Vincent Van Gogh).
    Peut-être Platon manquait-il de gratitude, ou alors il refoulait sa sensibilité ?

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