vendredi 6 mai 2016

Le réformisme et les drames du jardin.



Frêne menacé (par moi même)

En lisant un ouvrage de la sociologue Jocelyne Porcher consacré aux éleveurs et à leurs animaux je suis tombé sur une formule que je ne comprenais pas : " réformer un animal".  Le contexte m'a permis d'en déduire que cela veut dire : "supprimer un animal pour de bonnes raisons".

Ici, dans le jardin, il y a au moins trois plantes qui attendent à être réformées. Elles me font de la peine. Commençons par le frêne. Il a poussé comme  un signal joyeux (du genre : "hello je suis toujours là") à l'endroit même où son aïeul,  un arbre majestueux, a été abattu il y a une dizaine d'années parce qu'il devenait vieux.  Il s'élance maigre et vigoureux vers le ciel en prouvant, par sa verticalité pimpante, l'intensité de son élan vital.  Il  croit que je l'ai libéré des pierres qui l'entouraient pour le sauver. Il se trompe : en tassant des pierres je me suis limité à remarquer son existence, c'est tout.  A sa place, bientôt, il y aura du gazon.   

Dissimulé dans la haie, l'érable croyait passer inaperçu. Pour l'instant je  lui laisse cette illusion, mais avant de repartir il faudra le réformer. Je cherche à calmer ma mauvaise conscience en me disant que l'érable pousse partout, qu'il est  devenu une espèce invasive et que son arrachage fera du bien à la haie. Mais en regardant ses jolies feuilles toutes tendres et pleines de vie, je me dis qu'il pourrait devenir tout aussi beau qu'un arbre "non invasif", et que son caractère invasif n'est au fond qu'un prétexte pour l'extirper.

Le troisième a peut-être quelques chances de s'en sortir. C'est un if qui s'est matérialisé dans le pré il y a peu de temps, à proximité de la route. Les ifs peuvent vivre 3000 ans. Planter un if permet peut-être de s'inscrire dans son sillage et de se projeter, en quelque sorte,  dans le futur. Mais je ne maitrise pas le destin des plantes de ce jardin. Quelqu'un peut-être, passera sur l'arbrisseau avec la tondeuse.  Je lui dirai qu'il a tué un if et que, ce faisant, il a éliminé d'un seul coup 3.000 ans d'histoire potentielle. Il me répondra qu'il ne l'a pas fait exprès.

En tout cas, même lorsqu'il s'agit de plantes, c'est dur d'être un réformateur (ou faut-il dire "réformiste"?). 

6 commentaires:

  1. Oh!non! Il ne faut pas réformer ce vigoureux frêne! Servez-vous plutôt de ses feuilles pour en faire des tisanes (elles ont de nombreuses propriétés médicinales. Elles sont notamment antirhumatismales.)! Vous aurez ainsi une bonne raison de ne pas le supprimer!
    J'aime beaucoup cette petit chronique jardinière!

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    1. D'accord, pour le frêne j'attendrai un moment. Mais l'érable?

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    2. Vous pouvez essayer de récolter... du sirop!!

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  2. Vous ne devriez pas vous tracasser autant. Je viens tout juste de lire un article sur l'Union Européenne et le FMI qui veulent que la Grèce se réforme. Ils n'ont pas l'air d'avoir autant de scrupules que vous.

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    1. Réformer la Grèce me semble eccessif.

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    2. C'est sur que c'est un gros morceau. Ca fait cinq ans qu'ils s'y mettent à trois et ils n'ont toujours pas fini...

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