dimanche 26 mai 2019

Le charme discret des bombes à fragmentation



 
Je lis dans Libération un entretien avec  Claude d’Anthenaise qui commente l’œuvre de Théo Mercier, un jeune créateur très inspiré par les cabinets de curiosités et la notion de « domestication ».  D'Anthenaise décrit le potentiel scénographique du Musée de la Chasse et de la Nature, dont il est le directeur, devenu au fil du temps un important centre d’art contemporain : «  Mais les armes plaisent aussi beaucoup aux artistes, remarque-t-il avec un brin d’ironie.  Il y a un potentiel émotionnel énorme dans une collection d’armes : lorsqu’on expose par exemple une œuvre fragile à ses côtés, ça la tonifie ». 
Ces propos me reviennent à l’esprit  en croisant un monument aux morts dans les environs  du boulevard Raspail. Les armes plaisent en général, effectivement, ou du moins elles fascinent. Neutralisées, désamorcées, elles perdent leur pouvoir mortifère mais gardent intact leur « mana ». Elles sont appréciées par les municipalités, qui s’en servent pour décorer leurs mémoriaux. Elles sont aimées par les religieux parce qu’elles donnent à leurs cérémonies un surplus de solennité.  Elles sont admirées par la citoyens qui visitent les dits mémoriaux. Il y a à croire qu’elles plaisent  aussi aux morts  dont  les noms, peints en or, brillent pimpants dans le marbre. 

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