Pêcheuse à Brest (mon cliché)
(Suite)
Sur la jetée il y a des femmes qui pêchent, ce qui ne devrait pas m’étonner.
Même chez les chasseurs, proportionnellement, le nombre de femmes augmente. En
les observant de loin, je pense néanmoins aux études d’Alain Testart sur
l'interdit de verser le sang imposé aux femmes dans les sociétés
traditionnelles (il généralise beaucoup)*. Oui, mais tout ça est très loin, et
le sang des poissons ne se remarque pas trop. Sur le plan symbolique, de ce
point de vue, on peut hameçonner le palais d'une dorade sans enfreindre
le tabou. Et le thon alors, qui teint de rouge, avec son sang copieux, les
surfaces marines où il est traqué et harponné ?**
C’est vrai, le thon … et ben … pour confirmer le schéma proposé par
Testart, il faudrait tomber sur la règle suivante : les femmes aussi
peuvent pêcher le thon, mais au filet ***.
*Alain Testart, L’amazone et la cuisinière. Anthropologie de
la division sexuelle du travail, Paris, Gallimard, 2014
** Pour ne pas parler des globicéphales. Dans mon billet
du 6 mai 2021 je commente le traitement médiatique de leur pêche/spectacle dans
les îles Féroé, qui attire tous les ans des centaines de
journalistes à la fois joyeux (pour le « scoop ») et très indignés.
** Le monde change, certes, mais les grands schémas
d’organisation de la pensée symbolique n’évoluent pas à la même vitesse, et
c’est toujours amusant d'essayer leur pertinence ou leur inadéquation sur les nouvelles manifestations de la contemporanéité.
(À suivre).