jeudi 30 mars 2023

Héraldique et noms d’hôtel

 

 

- Pourquoi avez-vous changé de nom à l’hôtel ?

-  « Le lion d’or» faisait un peu vieillot.

C’était pas mal, pourtant.  C’était même classique. Il y en avait partout, autrefois,  de « Lions d’or »*. Ça sonnait bien. Et c’était évocateur :

« Le lit où on dort ».

Que fait le lion, fier etépuisé, après son long périple sur les routes  de France et de Navarre ?

Il dort.

*Ainsi que de "Chevaux blancs", tout aussi inactuels aujourd'hui.

 



mardi 28 mars 2023

Apparitions urbaines

 


Je suis à Chambéry pour parler de nos rencontres avec les animaux sauvages. Croiser des animaux sauvages est devenu important, aujourd’hui. Ça donne de l’allure et ça meuble les conversations. En quittant l’hôtel j’en vois deux. Sont-ils là pour moi ? Ont-ils un message à me transmettre ? Je sors précautionneusement le portable pour réaliser mon safari-photo (les animaux en ville … ça permet de philosopher). J’ai peur qu’ils partent dérangés par ma présence  mais ils s’en fichent éperdument*. Ils continuent leurs affaires et regardent ailleurs. Je fais un peu de bruit pour attirer leur attention : « Hey, tournez-vous vers moi, je vais vous immortaliser ! ».  Rien. Je reprends mon chemin. Un message à déchiffrer ? De toute façon, je me dis, les animaux sont comme des taches de Rorschach : on leur fait symboliser ce qu’on veut.

* En fait, ces deux là sont tout aussi sauvages que le lion de Tartarin.

samedi 25 mars 2023

L’homme qui a vu un porc-épic

 

L’homme qui a vu un porc-épic.  Mystique du sauvage et éco-voyeurisme.

"Cela vient de loin.  La mythologie, le folklore, la littérature cynégétique, les récits d’aventures, nous présentent l’apparition de l’animal sauvage comme une sorte d’épiphanie. Le sauvage ne se montre pas à tout le monde. S’il accepte de se manifester c’est qu’ il a des raisons, des messages à livrer. Et  son interlocuteur doit bien le mériter.  L’imaginaire contemporain reprend ce cliché en retouchant à peine les vieux  scénarios".

C’est le sujet de ma prochaine intervention au  Colloque interdisciplinaire hébergé par   l’Université Savoie Mont Blanc :
« Cohabitation entre pratiques récréatives et faune sauvage ». Voici le lien : https://www.univ-smb.fr/evenement/colloque-interdisciplinaire-cohabitation-entre-pratiques-recreatives-et-faune-sauvage/

jeudi 23 mars 2023

Derrière les apparences (annonce)

 


UE286 - Séminaire De l’humain animalisé au vivant humanisé

 Lundi 27 mars de 12h30 à 14h30,  Campus Condorcet-Centre de colloques, Salle 3.06, Centre de colloques, Cours des humanités 93300 Aubervilliers 


Animismes d'ailleurs et d'ici


 


Christophe Baticle, maître de conférences en socio-anthropologie, Aix-Marseille Université, OSU-Pythéas, UMR 151 LPED (AMU-IRD). En association avec Laurence Boutinot, chercheure socio-anthropologue, Cirad, Montpellier, UR Forêts et sociétés

Un croire inséparable du mode de vie forestier chez les chasseurs-cueilleurs « Pygmées »

Les peuples connus sous le nom de « Pygmées » restent associés à la représentation d’un mode de vie nomade ou semi-nomade, fait de chasse et de cueillette, et ce au sein de l’espace forestier de l’Afrique centrale. Si le terme est aujourd’hui décrié, la question de leur appellation ne peut pourtant pas dissimuler leur problématique majeure : la précarité dans laquelle ils sont placés. Au-delà donc d’un nominalisme « bon ton », nous viserons à montrer, concernant les Baka du sud-est camerounais et Ba’Aka du nord-Congo, qu’ils sont surtout contraints à déambuler au sein d’une série d’injonctions paradoxales : de plus en plus souvent interdits d’accès à la forêt, alors que leurs chants polyphoniques sont reconnus comme patrimoine culturel immatériel de l’humanité (PCI) par l’UNESCO. Or, l’ensemble des connaissances aujourd’hui associées à une culture vue comme « éco-friendly », mais encore ces chants labellisés PCI, sont intimement liés à la pratique forestière. En arrière-plan se profile ainsi une perception du couvert forestier produit d’un croire animiste qui ne doit rien à une réinvention éco-anxieuse contemporaine, mais qui se trouve aujourd’hui de plus en plus difficilement relié à ses fondements matériels.

 

Gérard Garouste Actéon et ses chiens

Sergio Dalla Bernardina `

Des animistes bien de chez nous (deuxième partie)

C ’est une évidence que nous avons tendance à oublier : le statut officiel des plantes et des animaux  ne correspond pas à leur statut fantasmatique. Le chasseur, a priori,  sait bien faire la différence entre un humain et un non-humain. Dans ses narrations, cependant,  dans ses rêveries, dans ses mises en rituel, il anthropomorphise sa proie.

 

.

 

mardi 21 mars 2023

Vous m’avez compris !

 



Têtu, ce cheval. On a beau lui faire des signes, il regarde ailleurs*

*Vers les autres pays de la Communauté européenne, peut-être. 

dimanche 19 mars 2023

Pâques approche. La fin d'un cycle



 

J’ai beaucoup appris lors de la dernière séance du séminaire « De l’humain animalisé au vivant  humanisé » (une des dernières en l’absolu, l’aventure prenant fin cette année). Dans les coulisses, on a parlé de pas mal de choses. La première qui me vient à l’esprit est qu'on peut élever des agneaux, les protéger, fraterniser avec eux et, le moment venu,  les manger avec plaisir.  Et pendant qu’on les mange, on raconte leur histoire. On retrace leur biographie. C’est une façon de les honorer.


vendredi 17 mars 2023

Vox clamantis in deserto (noms d'oiseaux)

 


Bassano est une petite ville du nord de  l’Italie où je transite souvent. Lorsque j’entends le mot « Fou de Bassan » je pense à mon cas.  Le fou de Bassano c’est moi. J’ai atterri dans le Finistère cela fait un long moment et je me suis mis à pontifier autour des animaux sur un blog. Depuis, j’ai lancé 1333 messages sans vraiment savoir pourquoi. J’y réfléchis et je me dis : « C’est absurde, disproportionné, à la limite du ridicule »*

* De temps en temps,  c'est vrai, quelqu'un réagit et m'encourage.

mercredi 15 mars 2023

La chasse et la lutte des classes

 


La chasse à courre … inutile de faire semblant, est une chasse de riches (et les riches, on le sait, sont cruels). Le piégeage des grives, inutile de faire semblant, est une chasse de pauvres (et les pauvres, on le sait, sont cruels). L’une comme l’autre, ne correspondent plus aux standards éthiques et vont bientôt disparaître. La chasse au faisan en revanche, est une chasse intermédiaire. Autrefois on l’aurait qualifiée de petite-bourgeoise. Elle durera, peut-être un peu plus longtemps.  

dimanche 12 mars 2023

Animisme et métamorphoses

 

Jack Vettriano, The Singing Butler, 1992

« Quand un chrétien meurt sans être en état de grâce, il passe dans le corps d’un phoque et y reste jusqu’au jugement dernier. Une fois tous les cent ans, Dieu lui permet de revenir voir les lieux qu’il a habités … Quelquefois, sous forme de beaux messieurs et de belles dames, les phoques viennent danser sur le rivage, après avoir dépouillé momentanément leurs peaux de bête. Malheur à celui qui enlève une de ces peaux » (E. Rolland,  Faune populaire de France, Paris Maisonneuve et Larose, 1967, réed. VIII, p. 168), cité par Marlène Albert-Llorca, L’ordre des choses, Paris, CTHS, 1991*.

Pour les phoques c’est l’inverse.

* Un  ouvrage précieux que je conseille à tout le monde.

vendredi 10 mars 2023

Marcher avec les moutons ... sur le trottoir (annonce)


UE286 - Séminaire De l’humain animalisé au vivant humanisé


Lundi 13 mars de 12h30 à 14h30, Campus Condorcet-Centre de colloques, Salle 3.06, Centre de colloques, Cours des humanités 93300 Aubervilliers 


Julie Lou Dubreuilh, Silvia Marzorati

Marcher avec les moutons ... sur le trottoir.

Les animaux domestiqués sont des présences qui animent le temps et l’espace, pas seulement celui de la campagne mais celui de la ville également, autant que les hommes. Quand la réciprocité de leurs relations est reconnue, une communauté hybride peut se constituer comme dans le cas des bergers qui exercent des influences sur le troupeau et, vice-versa, des moutons qui « apprennent à des humains à leur apprendre » (M. Meuret, V. Despret, Composer avec les moutons, Avignon, Cardere, 2016).
Julie Lou Dubreuilh, éleveuse-bergère et une des fondateurs de Clinamen, association créée en février 2012 à Saint-Denis, expérimente cet apprentissage dans des activités de paysannerie urbaine. En particulier l'élevage ovin pour la viande et pour la gestion des prairies avec le troupeau en pâturage en parcours. « Bien manger, bien dormir »  est le pilier des valeurs de l’association. Silvia étudiante en Master 2 en Territoires, espaces et sociétés à l’EHESS, dont le sujet d’étude est la fabrication du paysage par les mobilités humaines et non humaines, et bénévole à Clinamen, questionnera Julie Lou atour de la tentative de briser les frontières ontologiques entre naturalisme et animisme dans l'acte de manger ses amis moutons.

mercredi 8 mars 2023

Sacrifices d’hier et d’aujourd’hui (à propos du Salon de l’agriculture)

 

Je découvre que tous les animaux du  Salon de l'agriculture sont conduits à l'abattoir juste après avoir reçu le prix On l'explique par des raisons hygiénico-sanitaires (le risque épidémique etc.). C'est peut-être inévitable, mais cela reste  particulièrement sinistre. Je pense au sacrifice sanglant dans la Grèce ancienne : on choisissait l’exemplaire le plus beau, le plus sain, on le félicitait  ... et on l’immolait. Au Parc des expositions le sacrifice reste sanglant. Mais il est profane, sans transcendance*.

*Oui, je sais, s'il est  profane ce n'est pas un sacrifice.


lundi 6 mars 2023

En attendant l’ours qui fera parler de moi


Une autre attaque d’ours dans la région de Trente. Ce n’est pas comme dans les Pyrénées, où les ours locaux, qui sont manifestement  des poules mouillées, n’attaquent pratiquement personne. La victime  s’en est sortie avec des blessures à la tête et au bras, rien de particulièrement grave. C’est bon pour le commerce local. Les touristes viendront nombreux frissonner dans les bois.

vendredi 3 mars 2023

Le sexuel et le scatologique. À propos du Corriere della Sera

Girolamo Savonarola 

Je vais être particulièrement grivois. Mais c’est la faute au Corriere della Sera, journal auquel je regrette de m’être abonné*. C’est autour d’un tweet d’il y a dix ans mais ressorti tout récemment où Elly Schlein, la nouvelle secrétaire  du Parti démocrate italien, critiquait l’actuel directeur du journal Il fatto quotidiano. Elle évoquait, je cite, « Quel sorrisetto del c... di Travaglio, che potrebbe avere solo uno stronzo » : « Ce petit sourire du c... » (le mot entier serait « cazzo » qui signifie bite)  à savoir : « ce petit sourire de connard de Travaglio  que seulement un étron pourrait avoir ». C’est du franc parler. Il y a quelques jours, Monsieur Travaglio lui a répondu qu’elle avait raison, et que ce sourire lui surgit automatiquement  face à certains interlocuteurs. Je n’ai rien à dire sur ce contentieux. Je remarque seulement que Le Corriere della Sera n’a pas censuré le mot « étron ». Il a en revanche censuré le mot « cazzo ». Pour ses rédacteurs il y a donc une hiérarchie : le terme « étron » est acceptable, alors que  « bite » est mauvais. Voire diabolique? On se dirait à l’époque de la Sainte Inquisition. 

*J'expliquerai prochainement les raisons de ce regret qui n'a rien à voir avec l'anecdote commentée ici. 

mercredi 1 mars 2023

Des chiens pas tout à fait comme les autres

 

 

« Selon la croyance répandue à Albano, les maciari et maciare* se rendent la nuit au lieu de leur rendez-vous “à cheval sur des chiens” généralement blancs . Le paysan Vito Goffredo nous a montré un chien blanc qui, il y a cinq ans, présentait durant une partie de la matinée des traces sombres sur son dos, dessinant une selle : signe  qu’il avait été chevauché par des maciare. Autre signe : la lassitude de l’animal. Un paysan Giuseppe Molinari, nous a parlé « d’un chien qui, de garde la nuit dans une étable, était trouvé le matin épuisé et avec des marques sur le dos. » Ernesto De Martino, Italie du Sud et magie, Paris, Les Empêcheurs de penser en rond, 1999, p. 84

* La maciara, masciara, ma'ara ou maara est une personne à laquelle la culture populaire de l'Italie méridionale attribue des pouvoirs magiques (source : Wikipédia)