jeudi 31 décembre 2020

Bestiaire de fin d'année (avec mes remerciements)

 

Vache

Jeudi 30 décembre au matin. J'observe une vache qui stationne sereinement  juste de l’autre côté du muret (c'est réciproque, pour être précis). Du coup, je me mets à penser aux animaux que j’ai eu l’occasion de manger au cours de cette année (et à toutes les âmes que j’ai ainsi avalées, diraient les Inuits).

Leur adresser mes remerciements serait hypocrite. J’en compile juste la liste, par ordre alphabétique, en espérant n’avoir oublié personne :

Parmi les espèces qui sont passées sous ma dent en 2020 j’évoquerai l’agneau,  l’âne*, l’autruche,  le bar, le bœuf, la bonite, la caille, le canard, le cerf, le chapon**,  le chamois, le cheval, la chèvre,  le chevreuil,  le cochon, le colin, le congre, le daim, la dinde, la dorade, l’écrevisse,  l’églefin, l’escargot, l’espadon, le flétan, le grondin, la grenouille, l’huître, la julienne, la langoustine, le lapin***, le merlan, la moule, le maquereau, l’oie, la palourde, la pintade,  le poulet, le poulpe, la praire, la raie, le sanglier, la sardine, le saumon, le taureau, le thon, le tourteau, la truite, le veau.  Pas de zèbre.

Vu comme ça, c’est un véritable massacre. Je cherche à me justifier en arguant que  c’est dans l’ordre naturel des choses : « Allons, ne culpabilise pas, ne sois pas angoissé, c’est tout à fait normal … ». Mais l’ordre des choses n’est pas immuable : « [Nous avons été créés]  non pas pour vivre comme brutes - disait Dante Alighieri - mais pour suivre vertu et connaissance ».   Pour rendre la chose moins grave, je me dis que ma manière d’être au monde, avec ses limites et ses contradictions de carnivore, ne constitue qu’une étape dans l’histoire de l’humanité. Des gens plus sensibles et moralement plus doués que moi prendront la relève. 

Ils sont déjà là, en fait. Je les ai évoqués tout au long de l’année.  Ils nourrissent ce blog qui, sans leur contribution, n’existerait pas. Je les remercie sincèrement****.

* Je ne les ai pas mangés directement,  mais dans un saucisson, cela vaut aussi pour le taureau, la chèvre et quelques autres.

** Ce n’est pas une espèce, je le sais.

*** Pas de lièvre, hélas.

**** Même si ça peut sembler un peu hypocrite.

    

lundi 28 décembre 2020

Eros et Thanatos chez les bipèdes (réminiscence)

Il s’appelait Eros.  Il était  passionné de tir à la carabine. Une fois, pendant les vacances d’été,  on s’était rendu avec lui à San Marino. J’avais dix ans. On regardait  la plaine du haut du rocher. On apercevait des gens, tout petits. Je lui ai demandé :

- « Sont-ils à portée de tir ? ».

Il m’a répondu d’un ton didactique et amical à la fois, comme s’il me transmettait un secret :

 - Rappelle-toi que nous sommes des bipèdes. Si pendant que ta cible  marche tu vois du blanc entre ses jambes, c’est qu’elle est  à portée de tir. Ça fait deux cents mètres environ.

En revenant -  j’étais dans sa voiture -  je lui ai demandé :

- Eros, pendant la guerre vous est-il  jamais arrivé de tuer quelqu’un ?

- Oui, au moins un. C’était avec mon 91. Il était très loin et j’ai du régler la hausse. Il n’y avait que sa tête qui sortait. Comme celle d’une oie. On aurait dit une oie.

Depuis, j’ai toujours trouvé chez les oies quelque chose de particulièrement anthropomorphe.

samedi 26 décembre 2020

La Saint-Sylvestre approche. Pour en finir avec le foie gras


Parfois je me dis que porter l’attention sur les mauvais traitements infligés aux animaux n’est au fond qu’une excuse, dans le sens que ce qui est grave, pour les  bêtes que nous mangeons, est avant tout d’être tuées, ne serait-ce que de la manière la plus sympathique : « D’accord, dit le cochon de chez Herta, je suis content qu'on ne me torture pas, mais si je pouvais mourir de ma mort naturelle  ce serait encore plus sympa … »*.  En songeant au foie gras, cependant, j’avoue ma perplexité : certaines techniques d’élevage sont bien plus cruelles que d’autres. Grâce au travail des animalistes je réfléchis à cette évidence et mon intérêt pour le foie gras  commence à s’affaiblir.  D'un certain point de vue ça me soulage : en renonçant à cette friandise moralement douteuse,  je pourrai déguster sans complexes la viande des animaux qui ont vécu en liberté et qui sont morts foudroyés par un coup de carabine.**

*Je parle à sa place, c'est vrai. Je ne suis pas le premier.

**J’ironise, bien entendu, mais jusqu'à un certain point.

jeudi 24 décembre 2020

Vous gardez la tête ? Gastronomie de Noël

 


Pour le réveillon de Noël je mangerai un non-humain. Je viens de l’acheter et je le préparerai moi-même. Autrefois, je faisais tout ça (achat, préparation, consommation) dans le bonheur. Aujourd’hui un peu moins, car on cherche à me déstabiliser.  

Et si le Bon Dieu était antispéciste ?*

Voire, dans une autre perspective : et si les Antispécistes étaient le Bon Dieu ? La question est loin d'être saugrenue. À partir du moment où on commence à remettre en cause les frontières ontologiques les statuts se rapprochent.

mardi 22 décembre 2020

Une personne pas tout à fait comme les autres : le sapin de Noël (2)

 

L'apothéose de Spelacchio,  transformé en " Little baby home "  (sic) pour  l’allaitement et les soins corporels du bébé.

(Suite) Spelacchio répond via Internet.  Après quelques jours, son compte sur Twitter atteint les 2 000 inscrits et ce n'est que le début.  Parfois on parle en son  nom : « Spelacchio c’est moi »,  déclare  une follower française, « Foutez-moi la paix, je veux mourir dans la dignité »  réplique  un autre porte-parole du sapin. Parfois on s’adresse à lui : « Ciao Spelacchio, on t’a dit qu’ici à Rome il a neigé ? J’ai pensé beaucoup à toi, tu sais ? Tu te serais amusé beaucoup sous la neige ». Drôles d'internautes : s'agit-il de ventriloques? D'animistes? De ventriloques animistes?

Je cherche à interpréter cette construction collective dans les termes suivants :

« Qui est Spelacchio, ce morceau de bois qui, par enchantement, se met à parler comme Pinocchio ? C’est l’expression de notre désir que le monde, redevenu perméable et mystérieux, ne se réduise pas au scénario monodimensionnel des cosmologies matérialistes. C’est une projection de nous-mêmes en train de montrer notre compassion ou notre sarcasme. C’est l’« Autre », l’antagoniste imaginaire, réduit à l’état de « toilet brush » ou de porte-cotillons. En participant à son jeu — le jeu de l’ambiguïté ontologique — nous fusionnons avec les autres joueurs comme au cours d’une fête. Protégés par le collectif nous pouvons chanter en chœur la bonne nouvelle (« Le sapin est un des nôtres et nous l’aimons beaucoup »). Nous pouvons vilipender le vaincu (« Il est presque comme nous mais avec plein de défauts ». Nous pouvons nous émouvoir face à l’élan fraternel qui nous lie à des sapins (pelés, par surcroît). Et nous pouvons donner une issue socialement agréée à nos pulsions clastiques (...)*.

Inutile de rappeler que cette instrumentalisation des végétaux à des fins narcissiques (« Spelacchio c’est moi … ») se retrouve, renforcée,  dans nos rapports aux  animaux : l'animal comme prête-nom, l’animal comme prothèse.  

*« Nouveaux animismes : à quoi sert-il de personnifier les végétaux ? » in La langue des bois. L’appropriation de la nature entre remords et mauvaise foi, Paris Éditions du Muséum d’Histoire Naturelle, 2020, p. 246

dimanche 20 décembre 2020

Une personne pas tout à fait comme les autres : le sapin de Noël (1)

 

 

Spelacchio 

Dans un Occident postmoderne qui découvre enchanté ses soubassements animistes, le statut de « sujet  » n'est pas réservé aux animaux (humains et non-humains). Même les arbres, aujourd'hui, retrouvent leur rang d'interlocuteurs. C’est le cas de Spelacchio, sapin devenu « légendaire » en quelques années,  auquel je consacre le dernier chapitre de La langue des bois*.

En voici un extrait :

(…) Pour les célébrations de Noël de 2017 la mairie de Rome commande un sapin à installer dans la place Venise venant de la vallée de Fiemme, en province de Trente. Coût de l’opération : 50 000 euros. On s’aperçoit immédiatement qu’il n’est pas très en forme. Ses aiguilles tombent à grande vitesse laissant apparaître ses branches dégarnies. Des rumeurs, vite démenties, circulent : il aurait été empoisonné (pourquoi empoisonner un sapin de Noël ? Nul ne le sait). Virginia Raggi, maire de la capitale, le juge « simple et raffiné ». Les Romains ne partagent pas son avis et le baptisent « Spelacchio », à savoir Plumeau, ou Déplumé, à partir de l’adjectif spelacchiato, comme l’on dit d’un chat qui a perdu sa fourrure. Quelques jours avant Noël on déclare officiellement que « Spelacchio non ce l’ha fatta a sopravvivere », littéralement : « n’a pas réussi à survivre ». Il était déjà mort, bien évidemment, mais on considère son desséchement prématuré comme une seconde mort. Les experts se succèdent au chevet de Spelacchio. Après leur sombre diagnostic, même l’Assessorato all’Ambiente (le département de l’environnement) se résout à déclarer que le sapin, effectivement, est décédé. La presse internationale s’empare de l’histoire. The Guardian définit le sapin « mangy or baldy » en le comparant aussi, plus prosaïquement, à un « toilet brush ». Russia Today, fait de même. L’association des consommateurs (Codacons porte plainte contre la mairie et demande des dédommagements pour la « figuraccia internazionale » (la honte internationale). Pour consoler la population on installe une crèche artistique dans la place du Capitol mais cela ne suffit pas. Un administrateur propose, de remplacer la dépouille par une installation de comètes. Mais ici et là on commence à prendre la défense du Plumeau ». (op. cit., p. 241-242).

On se met à lui écrire. Et Spelacchio répond. (À suivre)

 « Nouveaux animismes : à quoi sert-il de personnifier les végétaux ? » in La langue des bois. L’appropriation de la nature entre remords et mauvaise foi, Paris Éditions du Muséum d’Histoire Naturelle, 2020.

vendredi 18 décembre 2020

Idée cadeau pour Noël : un diable de Tasmanie

 


 

On n’a pas le droit je sais, mais adopter un représentant de cette espèce sarcophile* peu appréciée par les éleveurs serait une bonne action**. 

Dans National Geographic  je lis : « Charognards, ces marsupiaux jouent un rôle important dans le maintien d’un écosystème sain. Les scientifiques espèrent qu’ils permettront de rétablir l’équilibre des zones où les espèces invasives comme les chats ensauvagés et les renards roux font rage ».

L'adoption d'un diable de Tasmanie m'offrirait un triple avantage:

1) Bien utilisé, ce fougueux diablotin  me permettrait de recycler intelligemment les restes liés à ma consommation de poulets bio, cochons qui ont vécu dans la béatitude, gigots dont la mort indolore a été certifiée par le mouvement L214 et contresignée par la fondation de Brigitte Bardot.

2) Ça me permettrait en outre de contribuer  à la préservation des écosystèmes en ôtant aux chasseurs tout prétexte pour semer la terreur dans les bois***. Y a-t-il trop de renards ? Pas besoin d’incommoder les  chasseurs.  Je sors avec mon diable de Tasmanie, j’approche du fourré, je lui retire la muselière …

3) Héberger chez moi un diable de Tasmanie pourrait me rendre plus intéressant : « Un diable de Tasmanie dans ton appartement ? C’est vrai ? T'es vraiment un type original, tu sais ? Je t’aime !».

Petite parenthèse : que les renards « fassent rage », comme l’écrit National Geographic, est un fait  notoire.

* Je n'ai pas inventé cette définition qui se prête en France (en Italie aussi, d'ailleurs), à des plaisanteries bas de gamme.

** Les éleveurs, toujours eux, ça commence à bien faire ...

*** Ces brutes armées, on le sait, s’amusent à massacrer les  renards au nom de la défense de l’environnement.

mercredi 16 décembre 2020

Une bonne nouvelle (autour de l'affaire " Saint Nicolas")

 


J’apprends que,  après notre signalement, l’âne de Saint Nicolas a été soustrait à son propriétaire, stérilisé et accueilli dans le refuge d’une célèbre association pour la protection des animaux.

lundi 14 décembre 2020

La fin des croyances (remplacées par des vérités)

 

 Giovanni Canu, Ballo dell'argia

On commence souvent à faire de l’ethnologie charmés par le folklore, par les traditions populaires. Après on s ‘en éloigne de peur de passer pour des nostalgiques, des érudits locaux ringards et poussiéreux.  On aime bien étudier la pensée mythique, mais notamment si elle concerne les Grecs anciens, les Dogons ou les Nambikwara (c'est plus chic).  Cependant, même les croyances de chez nous, comme le rappelait Antonio Gramsci, avaient leur dignité. Elles  répondaient à une conception du monde cohérente, donnaient du sens à la réalité et s’interrogeaient sur son fonctionnement. Aujourd'hui, après avoir rempli leur rôle  pendant longtemps, ces croyances disparaissent par blocs, une après l’autre, comme des falaises englouties par la mer*.

J’y pensais en relisant ce passage de La danse de l’Argia** et je me disais :  d’ici peu, de ces questionnements fins et singuliers sur la condition humaine,  de ces réponses humbles et efficaces au mal de vivre, il ne restera plus aucune trace  :

 « L’argia erre dans les campagnes ; elle peut passer à côté de plusieurs personnes sans les attaquer ; elle frappe au hasard celui dont le “destin” est d’être touché par le malheur. La personne piquée “tient” l’argia ou bien “l’âme” de l’argia ou encore (…) son tempérament et ses différents penchants qu’elle lui a inoculés avec le venin ». (…) Les différentes argia et leurs identifications cérémonielles relèvent d’une typologie relativement constante : l’argia pizzina (petite fille), aime être bercée par les ninne-nanne, l’argia bagadìa (nubile), isposa (fiancée), cojada (mariée) ou collionada (séduite) apprécie les chants d’amour et peut rechercher pour la danse un partenaire qu’elle considère comme son fiancé. L’argia prentoxa (parturiente) nécessite la représentation d’un accouchement symbolique, l’argia fiuda (veuve) est en deuil et pleure la mort de son époux ; l’argia beccia ou nonnina (vieille), comme la veuve, se caractérise par une tendance à l’immobilité et à la torpeur à laquelle on peut répondre par l’enfournement thérapeutique ; l’argia martura (malade)  refuse la danse et peut apprécier les secousses d’une charrette ». *

* Remplacées par des croyances nouvelles, bien entendu, qui ne deviendront des "croyances" que plus tard. 

** Nous avons déjà évoqué cette étude le 8 décembre.  

*** Clara Gallini, La danse de l’Argia. Fête et guérison en Sardaigne, Paris, Verdier, 1988, p. 40

samedi 12 décembre 2020

Les larmes du cerf

Un des rares avantages des séminaires en ligne c'est qu’on peut y assister de loin.

EHESS,  UE446 - De l’humain animalisé au vivant humanisé (deuxième année : risques et avantages de la proximité ontologique). Lundi 14 décembre de 15h à 17h

 

Charles Stépanoff
 

« Les larmes du cerf : empathie et sentiment anti-chasse en France ».

 

L’étude des sources anciennes sur la chasse en France depuis le Moyen Âge et la comparaison ethnographique montrent qu’il existe un sentiment anti-chasse à l’intérieur même de la chasse. Le danger des excès de la chasse donne lieu à des motifs mythologiques sur l’ensauvagement et le cannibalisme du chasseur. L’interprétation des larmes du cerf permet de suivre l’évolution des sensibilités en Occident et l’avènement d’une division moderne du travail émotionnel entre chasseurs et défenseurs des animaux.

 

Voici le lien :  https://webinaire2.ehess.fr/b/gui-zas-zrq

jeudi 10 décembre 2020

Encore sur Saint Nicolas (les dessus peu clairs d’une entreprise philanthropique)

 


Je reviens sur l’âne de Saint Nicolas.  Oui, parce que c’est facile de se trimbaler à droite et à gauche pour faire des cadeaux. Mais qui les porte tous ces cadeaux,  hein,  qui les porte ? C’est l’âne. Il faudrait signaler le cas. Ça mériterait un contrôle de l’Inspection générale du travail … Mais que font les associations pour la protection des animaux ?

Et ça vaut aussi pour le Père Noël.

mardi 8 décembre 2020

Animistes locaux (1 : autour d'une danse de possession)

 

Âme d'un défunt cachée dans une araignée (Latrodectus tredecimguttatus)

Je vois une araignée et je pense à la belle étude que Clara Gallini a consacrée à la danse de l’Argia*. Il arrivait, dans la Sardaigne traditionnelle, d’être piqué par l’Argia, insecte réel et fabuleux à la fois,  parfois grosse fourmi, plus souvent araignée. Comme dans le cas de la tarentule étudié par Ernesto De Martino dans les Pouilles, la morsure de l’Argia déclenche un phénomène de possession et est soignée par la danse. C’est un bel exemple de musicothérapie.

À la différence de ce qui se passe dans la région de Taranto (la tarentule - "monstrum mythique", comme la définit De Martino - a une identité autonome),   l’ Argia est l’incarnation de l’âme d’un mort qui n’a pas trouvé sa place dans l’au-delà. Elle en veut donc aux vivants et elle cherche à se venger. 

Bref, il ne faut pas aller très loin de chez nous pour trouver des animistes (et en faisant un peu d'introspection, peut-être, on n'a pas  à s'éloigner du tout).

* Clara Gallini, La danse de l'Argia. Fête de guérison en Sardaigne, Paris, Verdier, 1988.

dimanche 6 décembre 2020

6 décembre. Saint Nicolas revient

 


Au siècle passé, les enfants des Alpes Orientales (dont j’ai fait partie pendant quelques années) attendaient Noël avec impatience*. L’épiphanie aussi  les motivait beaucoup. Mais le centre de leurs passions restait la Saint-Nicolas.

Si j’étais Saint Nicolas, aujourd'hui, avec tous ces  ours et ces loups qui traînent partout, je ferais gaffe à mon âne.

* Ce qui est normal.

vendredi 4 décembre 2020

Mange et tais-toi! Des bonnes nouvelles pour les non-humains

 

 

Gourmets dégustant des nuggets aromatisés à l’ortolan

  

« Des nuggets à base de viande de poulet fabriquée en laboratoire par la start-up californienne Eat Just pourront bientôt être vendus dans les restaurants de Singapour après une autorisation délivrée, mercredi 2 décembre, par les autorités sanitaires du pays, qui les ont jugés sans danger pour la consommation » (Le Monde du 2 décembre). La viande artificielle, voici une bonne nouvelle. L'humanité sera plus humaine. Finalement de quoi nourrir les ours et les loups sans faire du mal aux herbivores domestiques.

mercredi 2 décembre 2020

On est ce qu’on mange (à propos des sangliers)

 

Allez savoir pourquoi, je me laisse distraire par les histoires d’ours et de loups, alors qu’il faudrait se concentrer sur les sangliers. Les sangliers sont très « bons à penser », comme le dirait Lévi-Strauss. Ils sont plusieurs choses à la fois (fauve et cochon, par exemple), ils digèrent n’importe quoi et sont les protagonistes quotidiens de toute une série d’histoires qui vont du pittoresque au tragique. Il y en a qui divaguent comme des desperados sur le circuit autoroutier, d’autres qui se font abattre en plein centre ville par les agents communaux sous les yeux des enfants en larmes (à Rome, tout récemment), d’autres qui font de la peine (même s'ils pullulent et sont très poilus) et parviennent à se faire adopter (c’est interdit mais on s'en fiche …). D’autres encore qui – comble de l’ingratitude – après avoir été adoptés finissent par manger leur bienfaiteur. Le sanglier, il faut s'en souvenir, est omnivore.