samedi 31 octobre 2020

Une présence dans les bois



La présence en question

J’ai passé quelques jours dans les bois et ramassé des champignons. Il n’y avait personne. Jeudi, j’ai entendu les cors de chasse et les aboiements des chiens. C’est toujours comme ça, à cette époque. Ils ne venaient pas dans ma direction. J’étais un intrus et je le savais très bien.  Pas de quoi faire un esclandre. Pas de quoi incommoder le Président de la République. J’ai attendu patiemment sans trop bouger  en me disant : « Maintenant je vais me faire gronder ».  Après les coups de feu qui ont mis fin à la poursuite du gibier,  j’ai repris ma quête. « Et si j’étais rejoint par une balle perdue ? Ce serait tragicomique*. Ce qui est sûr, c’est que ça attirerait l’attention sur mon blog ». Du coup je me suis aperçu que je n’étais pas seul. Tout près de moi, dans le vert foncé de la mousse, une chenille conduisait son existence parallèle.  Elle brillait singulièrement, dans les teints opaques du crépuscule, comme si elle était phosphorescente. On aurait dit une apparition.

.* Il passait son temps à étudier le monde des chasseurs, voilà le résultat …

lundi 26 octobre 2020

Castrare humanum est

 

Tant que l’on se limite aux chiens … . Oui,  parce que dans le passé, pour une raison ou pour l’autre, nous avons ratissé plus large. Dans la mesure où même les chiens, désormais, sont devenus des "personnes", peut-on les stériliser sans leur consentement? 

Je fais le crétin, bien entendu, mais c’est pour signaler l’état  de passivité  dans lequel nous recevons, sans réagir, ces informations ubuesques*. Aurions-nous fait l’objet d’un étourdissement préalable ? Il y aurait pourtant de quoi débattre.

* On se déplace en Afghanistan pour  châtrer 7.000 chiens.

samedi 24 octobre 2020

Maurice revient


Maurice 

- Regarde, Maurice est revenu.

- T’es sûr qu’il s’appelle Maurice ?

- Ben, non. (Rire).

- Enfin, je voulais dire :  t'es sûr que c’est le même que l’année passée ?

mercredi 21 octobre 2020

Où est passée la violence d'antan? (2 et fin)

 


 

Photo empruntée à : https://www.lavocedeltrentino.it/2020/06/25/abbattimento-orso-insorgono-le-associazioni-animaliste

En 2019 l’ours M49 a été protagoniste de 44 attaques : 26 étables, 11 ruches, 7 maisons. Il a dépecé 13 vaches ,  7 chevaux,  17 moutons et chèvres,  3 poules, tout en blessant d’autres animaux dans la province de Trento. De quoi mettre de l’ambiance dans la verdure monotone  des vallées alpines.

Dans mon post du 17 octobre je parlais de l’ambiguïté des appels au progrès moral  qui nourrissent le débat animalitaire. Si j’insiste comme un obsédé sur ce point, c’est que, bien que les enjeux soient primordiaux (la respectabilité du citoyen, sa légitimité sociale,  son « rang »)*, cette ambiguïté fait l’objet d’un refoulement collectif **.  Le raisonnement est pourtant très simple :  où est passée la violence qui trouvait son expression dans la chasse, dans la corrida et dans les autres folk games qui avaient pour victimes des bêtes innocentes ?  Elle n’a pas disparu, elle s’est juste déplacée. Elle prend la forme d’un lynchage moral à l’adresse des catégories qui n’ont pas intégré le nouveau paradigme (les catégories qui continuent de pratiquer la mise à mort des animaux sans la déléguer aux autres***).  Elle joue sur l’indignation pour disséminer partout des images sanglantes qui restaient associées, autrefois, à des lieux et à des moments spécifiques.  Elle s’exprime – et c’est encore par délégation - dans l’action des grands prédateurs qui font couler le  sang dans des circonstances éthiquement irréprochables.

Dans Faut qu’ça saigne j’écris :

« Mais si cette saignée périodique de bêtes innocentes remplit des fonctions pharmacologiques, peut-on vraiment s’en priver ? Peut-on renoncer à l’efficacité symbolique assurée par un « vrai mort », un mort en chair et en os, pour se contenter de sa copie ? En d’ autres termes, comment conserver le rôle cathartique du massacre des innocents assuré par les chasseurs sans octroyer à ces derniers le droit de tuer ? Rien de plus simple : en déléguant à d’ autres la fonction sacrificielle »****.

* La  facilité avec laquelle  n’importe quel « zoophile » improvisé  peut  aujourd'hui délégitimer des personnes parfaitement raisonnables  en les qualifiant de « stupides » et d’ « arriérés »   pose des questions éthiques  qu’il serait temps  de débattre.

** Je rappelle l’existence, à côté des enjeux animalitaires, d’enjeux personnels, de pouvoir ou économiques, dont les animaux ne sont que le prétexte.

*** Celles qui ne cachent pas le drame objectif de la mort animale en le réduisant à une question de « bonne » et de « mauvaise » mort.

**** Faut qu'ça saigne. Écologie, religion, sacrifice, Éditions Dépaysage, 2020. L’insistance sur cette ambiguïté, à l’époque où l’amour pour les animaux est devenu un devoir et un status symbol,  rend  ce livre imprésentable ou, plus précisément,   « immonde » au sens étymologique.

mardi 20 octobre 2020

Pas en mon nom (autour d’une publicité pour le confit de canard)

Vieille carte postale. Franche dans ses rapprochements (le magret et le canard),  elle serait   aujourd'hui inconcevable

Ces derniers temps j’entends à la radio une publicité déconcertante invitant à la consommation du confit de canard*. Lorsque je l’écoute, j’ai honte de moi. J’ai honte de défendre dans mon blog les "carnivores" dont je fais partie, les éleveurs (je ne les défends pas toujours, la catégorie est très bigarrée), voire même les chasseurs**. Si manger des animaux nous assimile au personnage dégoûtant représenté dans cette pub, il ne nous reste qu’un choix : le végétarisme radical.

Peut-on être un réactionnaire obtus et aimer passionnément les animaux ? Les exemples, même célèbres,  ne manquent pas.  Peut-on ne pas être un réactionnaire obtus et continuer à manger des animaux ? Les antispécistes d’un côté, ceux qui ont financé cette publicité de l’autre, semblent nous dire que non.

En surfant sur le net, je me suis aperçu que je ne suis pas le seul à éprouver ce sentiment. https://mediateur.radiofrance.fr/non-classe/42-publicite-pour-le-confit-de-canard/

*J'aime bien le confit de canard.

** Qui n’ont rien à voir avec les canards en question, bien évidemment.

dimanche 18 octobre 2020

L’antidote du fanatisme religieux ? La psychanalyse.

 

Quelqu'un aurait bien aimé lui couper la tête

Dans un cadre officiel je présenterais les choses différemment (en replaçant l’événement dans son cadre sociologique, politique, religieux).  Je dirais ici – c’est la première idée qui me vient à l’esprit -  que l'assassin  de Samuel Paty et ses "supporters" * profitent de la divinité dont ils se réclament (peu importe que ce soit celle-ci ou celle-là), pour assouvir leur désir  de couper la tête de quelqu’un**.

* Qui ne sont pas tous Musulmans : j'ai entendu déclarer à plusieurs reprises que "Les rédacteurs de Charlie, en tout cas, étaient allés trop loin ...". 

** Plus on admire ce "quelqu'un", plus on le craint et on le jalouse, plus on a envie de lui couper la tête.

samedi 17 octobre 2020

Où est passée la violence d'antan? (1 sur 2 voire 3)

 

Tweet de l'association PETA apprenant l'éthologie (et la sensibilité) aux éleveurs

On m’a fait remarquer le caractère monocorde  de mes dernières interventions. Je dois me justifier. Il provient de mes rapports avec Twitter. En fait, pour suivre de près le débat sur le bien être animal,  je me suis abonné  aux comptes des associations  les plus représentatives. Depuis, je suis  inondé par des communiqués incitant au progrès moral et à la bonté (personne ne me l’avait demandé, c’est vrai).  Je finis ainsi par confondre  la fréquence de ces messages sur mon compte Twitter avec leur fréquence dans le monde réel (qui reste néanmoins considérable).

Le problème de ces communiqués est que, à côté des propos humanitaires, ils contiennent souvent des incitations à la haine. On  peut comprendre la haine de l’animaliste à l’égard des chasseurs et des bouchers. Mais la stigmatisation porte sur beaucoup d’autres catégories.  N’importe quel  propriétaire d’un quadrupède d’appartement*, aujourd’hui,  se croit en droit de donner des leçons d'éthique animale aux éleveurs ** (à suivre).

* Il ne faudrait pas que je l'appelle comme ça, je sais, et je lui demande pardon. C'est que "non-humain" est trop générique et "non-bipède" prête aussi à confusion. Mes excuses aussi auprès de ceux que je qualifie ici   de  « propriétaires »,  alors qu’ils  sont en fait des amis,   des interlocuteurs.

** Pour ne pas parler des vivisecteurs et des Musulmans.

jeudi 15 octobre 2020

Bref épisode néocolonial

 

 

C’était dans les Alpes, cet été. Je faisais la queue pour acheter une portion de friture (ils viennent tous les samedis de la lagune de Venise,   et les autochtones apprécient). Mon regard est tombé sur une anguille. Elle bougeait lentement dans une cage en plastique. C’était pour montrer qu’elle était  fraiche et « bien vivante »*.  Quels barbares, me suis-je dit, ils n’ont pas encore réalisé que ce genre de choses, aujourd’hui, doivent rester cachées. J’aurais voulu leur donner mon conseil, mais ils m’auraient répondu avec des mots dialectaux que je n’aurais sûrement pas compris **.

* Avant de mourir, effectivement, les animaux sont vivants. Et ce n’est pas Monsieur de la Palice qui dirait le contraire.

** C’est typique de ces gens arriérés qui ont un besoin urgent d’un éducateur. 

mardi 13 octobre 2020

Les Nouveaux curés. Animalisme et pouvoir

 


Face au "désenchantement du monde" annoncé par Max Weber et étudié en profondeur par Marcel Gauchet* nous sommes tiraillés. D'un côté nous regrettons  le déclin de la spiritualité, l’émergence de l’individualisme, de l’éthique marchande, du capitalisme... ** 

D’un autre côté, nous sommes heureux d’avoir laissé derrière nous le sentiment de culpabilité associé à la tradition  judéo-chrétienne. À notre époque, tant bien que mal, nous pouvons nous livrer aux plaisirs de la chair l’esprit dégagé. Nous pouvons « consommer » sans en avoir honte,  sans que le curé, ou autre porteur de la bonne nouvelle,  vienne jeter un coup d’œil dans notre lit. Ça libère, ça restitue à notre existence une partie de sa naturalité.

Pour cette raison, je trouve inacceptable que les membres du mouvement L214, les animalistes, et autres remplaçants des anciens moralisateurs**, prétendent  faire du prosélytisme dans les écoles. Cela reviendrait à déstabiliser les écoliers en générant chez eux des sentiments de culpabilité d'un genre nouveau ***, avec les troubles psychiques et alimentaires que cela impliquerait.

Une fois le doute sur le  régime carnivore installé ("Est-ce bien ou est-ce mal?"), qui gérerait leurs angoisses ? Les nouveaux ministres du culte, bien évidemment, les "Nouveaux curés". Derrière le discours sur le rapport aux animaux - j’insiste - se cachent des enjeux de pouvoir (pouvoir sur les consciences, pouvoir sur les êtres), dont « nos amis les bêtes » ne sont souvent qu’un prétexte.

Inutile de préciser que  je trouve tout aussi inadmissible la prétention des chasseurs (ainsi que celles des lobbies de la viande, du sucre et du lait) de  faire leur  propagande dans les écoles. Je suis d'ailleurs étonné que le Gouvernement français puisse le tolérer.

  * Et mis en caricature par Michel Maffésoli.

 ** Le religieux n'est pas mort pour autant, il s'est juste déplacé. J'aborde ce thème dans   Faut qu’ça saigne. L'amour de la nature, entre écologie et religion, Éditions Dépaysage, 2020

*** L'interdit se déplaçant des "plaisirs de la chair" aux "plaisirs de la viande" - et le regard indigné  du  censeur, de notre lit à notre assiette.

****Des anciens gestionnaires de l'autorité morale.

 

 


 

vendredi 9 octobre 2020

Qui est le nul ? À propos des chasses traditionnelles

 

Oiseleurs de la province de Trente. Image tirée de mon article : "Phénoménologie d’un piège végétal : le roccolo" https://www.cairn.info/revue-cahiers-d-anthropologie-sociale-2013-1-page-16.html

 

J’ai consacré une partie importante de mes recherches au monde de la chasse.  Je crois pouvoir confirmer  que les chasseurs du dimanche, les tueurs de faisans d’élevage caricaturés par les écologistes, les machos fascistoïdes qui profitent de la chasse pour sortir armés, les sadiques qui tirent sur des chats domestiques*,  les ignares qui ne sauraient pas distinguer  une caille d’un perdreau mais qui se gargarisent  en parlant de tradition, de nature et de biodiversité, existent bel et bien.  Ils sont même nombreux. Ils ont toujours méprisé les chasses traditionnelles** présentées pendant très longtemps, dans la presse du secteur, comme des chasses de « plouc » et de « braconnier ». Chasses « cruelles ».

De leur côté, les adeptes des chasses dites traditionnelles - dont l’efficacité est directement proportionnelle aux compétences naturalistes*** - ont toujours considéré ces "pistoleros" comme des amateurs.

* « Domestiques ? On ne sait jamais, allons vérifier … »

** Sauf, peut-être la chasse à courre, dont ils sont jaloux. Par "chasses traditionnelles" j'entends ici la chasse aux petits oiseaux, le piégeage et autres formes de capture n'impliquant pas forcément l'utilisation d'une arme à feu.

*** Leur approche est une approche « holiste » : il faut connaître le « système nature », à savoir le « tout environnemental», pour attraper quelque chose.

mardi 6 octobre 2020

Empathie : peut-on ne pas aimer les animaux ?

 

A-t-on le droit de ne pas aimer la nature? Oui, mais c’est devenu presque honteux. Chez les intellectuels engagés que j’admirais à 18 ans, en revanche, aimer la nature était qualifié de “vitalisme petit-bourgeois”. Le camarade sérieux n’aimait pas la nature, c’était frivole*.

Et peut-on ne pas aimer les animaux ? Ça alors … c’est du blasphème. Une amie italienne  m’a avoué : « Pour moi, comme je le dis souvent en scandalisant mes interlocuteurs,  les animaux et, par conséquent, la discussion les concernant, pourraient ne pas exister ».

C’est légitime, je trouve, mais terriblement démodé. Il n’empêche qu’en assistant aux luttes intertribales pour établir qui est l’ami des animaux le plus sincère (« Moi je les adore depuis toujours  … », « Oui, mais tu n’es pas végétarien …», « C’est vrai,  mais je ne mange que du poulet cruelty free et je suis contre la chasse à la glu…) »,  cela donne envie de tenir le même propos.

* Aujourd’hui ils ont changé d’avis, mais c’est trop tard. 

samedi 3 octobre 2020

Pourquoi ça traine? En attendant les suites de l’affaire Pilarski

 

 

 Pitbull se demandant : "Pourquoi tant de violence dans le monde"?

J’ai rêvé que la chasse à courre avait été abolie*. Plus de chiens courants dans les bois. À leur place, des meutes de pitbulls, dobermans, et rottweilers parfaitement inoffensifs (il suffisait de bien les dresser), tenus en laisse par leurs maîtres et maîtresses comme prévu par le règlement.

* Ce qui, dans le rêve, me paraissait une bonne chose :  je déteste le bruit et je n'aime pas, dans la chasse à courre, son élitisme dissimulé, sa déconnexion des finalités alimentaires et ses réverbérations néo-folkloriques.