On m'a fait
remarquer, à juste titre, que contrairement à ce que ce blog laisserait
entendre l'animal n'est pas forcément un prétexte : derrière les prises de position
de plus en plus nombreuses en faveur de la cause animale il y aurait tout
simplement l'empathie (on s'identifie à l'autre et on ressent ce qu'il doit
ressentir). Ce fait est
indéniable, nous avons tous tendance à "empathiser" avec les animaux (sauf, dans mon cas, avec un chien que
je croise tous les jours dans la rue et que je trouve particulièrement impoli
et plein de préjugés. Ses émotions ne m'intéressent pas).
La sympathie
(étymologiquement : participation
à la souffrance d'autrui), n'est pas lointaine de l'empathie. Personnellement je
n'aime pas trop les gens qui sympathisent au quart de tour. Aujourd'hui ils
vous adorent, demain ils vous détesteront avec autant d'enthousiasme. J'en connais certains, par ailleurs, qui
sympathisent plus volontiers avec leurs animaux de compagnie qu'avec leurs collègues (philosophes, ethnologues et autres
chercheurs explorant les rapports homme/animal). Nous avons le droit, et peut-être même
le devoir, de solidariser avec notre prochain toute espèce confondue. Rien ne
nous empêche, cependant, d'étudier
la manière dans laquelle l'amour pour les bêtes peut être instrumentalisé.
" Un être humain est une partie d'un tout que nous appelons: Univers. Une partie limitée dans le temps et l'espace. Il s'expérimente lui-même, ses pensées et ses émotions comme quelque chose qui est séparé du reste, une sorte d'illusion d'optique de la conscience. Cette illusion est une sorte de prison pour nous, nous restreignant à nos désirs personnels et à l'affection de quelques personnes près de nous. Notre tâche doit être de nous libérer nous-même de cette prison en étendant notre cercle de compassion pour embrasser toutes créatures vivantes et la nature entière dans sa beauté."* Cette intuition édénique d'Albert Einstein est peut-être ce qui anime les amicaux intempestifs, humains ou non. Ayant manqué de lucidité sur la distance qui nous sépare du Nirvâna, ils peuvent, comme vous l'observez, retourner leur amitié en détestation : "T'es plus ma copine (mon copain)" dit-on très tôt, en substance. Ils ont oublié au passage que l'objet de leur sympathie n'avait aucune obligation de répondre à leurs attentes idéalisées, dont souvent il n'avait pas même conscience, et qu'eux-mêmes ne sont pas forcément des cadeaux.
RépondreSupprimerIl y a la méfiance (que vous revendiquez) des êtres lucides sur la précarité des relations humaines (et non humaines) : l'une des figures extrêmes de cette prévention est la princesse de Clèves, qui préfère renoncer à celui qu'elle aime plutôt que de s'exposer à l'effondrement de son amour, qu'elle pense inéluctable s'il devient concret.
Il y a aussi des amicaux lucides. En plus d'une tendance naturelle à sentir les fils subtils qui nous relient, ils font un choix existentiel : conscients de leurs propres limites et convaincus que l'amour est la seule solution, ils essayent d'aimer le monde et les gens avec leurs faiblesses, en se servant du modèle de l'indulgence parentale ou amoureuse.
On peut avoir été tout ça.
Pour ce qui est de l'instrumentalisation des uns par les autres, oui bien sûr. En ce moment, c'est moi qui suis la cible d'une petite chatte loufoque qui a commencé à monter la garde le soir-même du trépas de ma chienne très aimée. Elle a déjà gagné je crois.
*Selon « The New York Times » (29 Mars 1972) et « The New York Post (28 Novembre 1972), cette citation provient d’une lettre écrite par Albert Einstein en 1950.