J’ai récemment participé à une journée d’étude sur les safaris. Tout le monde a
souligné le caractère anachronique
et indécent de ce genre de spectacles.
L’autre jour
l’ancien militant du groupe « Proletati armati per il comunismo »
Cesare Battisti a été arrêté par la police bolivienne et ramené en Italie.
Je n’ai jamais éprouvé la moindre
sympathie pour Cesare Battisti et, plus largement, pour ces personnages
violents et arrogants qui, à l’époque des Brigades Rouges, avaient trouvé dans la lutte armée un bon
prétexte pour tirer sur quelqu’un*.
Le
gouvernement italien a scénarisé le retour de Battisti en Italie comme un
safari. Dans la vidéo diffusée par le ministre Bonafede, Battisti remplit le rôle de la bête
sauvage (on l’exhibe comme un
fauve), les représentants de l’Etat
jouent la part des chasseurs, et les policiers celle des rabatteurs. Une jolie petite musique agrémente la scène. Battisti se comporte avec dignité.
En regardant les images, j’ai comparé le regard sombre de Battisti (tant pis pour
lui, encore une fois) au triomphalisme obscène de Matteo Salvini qui annonce la
capture de l’ancien militant. J’ai pensé aux clandestins
qui se noient par centaines dans les eaux
méditerranéennes et aux citoyens
italiens qui, grâce à la loi qui va être promulguée, pourront flinguer leur prochain avec plus de désinvolture, à la manière des Américains**.
D’où vient la
joie de Matteo Salvini ? Du fait d’avoir arrêté un délinquant, bien évidemment. Mais aussi, dans un pays ou le mot "intellectuel" est devenu une insulte, d’avoir assuré à
la justice un homme qui a écrit des livres.
* Ça excite et ça défoule à la fois comme dans un vrai
thriller. C’était pour la lutte des classes, dans ce cas, mais ça aurait pu être au nom de Dieu, ou pour donner une leçon aux
supporters de l ‘équipe rivale.
** On n'arrête pas le progrès.