samedi 2 mai 2020

Chantera bien qui chantera le dernier (être coq à Hong Kong)



Collectif de gallinacés bretons (toujours les mêmes)
J’évoquais l’autre jour les procédures, recueillies par  Paul Sébillot dans la France profonde*, assurant des effets thérapeutiques par l'immolation d'un oiseau**.  Mon regard est tombé ce matin sur un passage du premier des deux livres consacrés par  l’anthropologue Frédéric Keck aux phénomènes pandémiques:

« À Hong Kong, je pus assister à un festival taoiste (jiao). Un anthropologue de l’Université des Sciences et des Techniques, Liu Tik-Sang, me recommanda d’y participer, ce qui me permettrait de mieux comprendre comment les gens ordinaires utilisaient les oiseaux pour se protéger des maladies. Liu Tik-Sang avait étudié la culture populaire des villages de migrants, et s’indignait des mesures de biosécurité imposées aux villageois, qui écrasaient selon lui les savoirs locaux dans leur réponse au malheur. Le festival jiao s’ouvrait ainsi par l’abattage d’un coq, dont le sang était versé aux quatre coins de l’emplacement de la cérémonie à des fins de purification. Le coq n’est pas consommé en Chine, car il est considéré comme toxique en raison de sa puissance sexuelle – seul les coqs castrés peuvent être consommés -, de sorte que l’abattage d’un coq non castré produit l’inverse d’une intoxication alimentaire ».

Les logiques changent, les associations symboliques aussi, les oiseaux s’adaptent.


*Le folkloriste Paul Sébillot est né en 1843 et mort en 1918.
** Ce n'est pas un sacrifice, c'est un transfert de la maladie.
*** Frédéric Keck, Un monde grippé, Flammarion, 2010, 167-168 (voir aussi, Les Sentinelles des pandémies. Chasseurs de virus et observateurs d’oiseaux, Zones Sensibles, 2020).

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