samedi 20 mai 2023

Le droit d'être là (annonce)

 

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Sentier corse en voie de disparition (cliché SDB)

La participation à la journée d’études « Ruralités contemporaines  en question(s) » du 22 mai remplacera la séance du séminaire « De l’humain animalisé à l’animal humanisé » prévue le même jour entre 12h30 et 14h30. Elle permettra aussi de rattraper le deux séances qui, en raison d’un calendrier peu propice, n’ont pas pu être assurées.    

 

Journée d’études du Séminaire Ruralités contemporaines en question (s) 22 mai 2023 13h30-18h

Campus Condorcet, salle 100

Cours des Humanités

93322 AUBERVILLIERS

www.campus-condorcet.fr

(contact : Sophie Bobbé, 06 07 72 04 42)

 

Le droit d’être là : conflictualités territoriales et modes de légitimation.

La discussion sur le droit de propriété privatif tel que mis en exergue par la déclaration des Droit de l’Homme et du citoyen, la montée en puissance du thème des communs, et plus généralement l’affirmation d’une philosophie morale inscrivant l’humain comme une composante du vivant parmi d’autres, ont exacerbé les enjeux autour des espaces naturels les plus convoités et les plus pratiqués : tourisme, mais aussi activités sportives de glisse, d’escalade, de marche etc. Toutefois les campagnes restent des territoires vécus, des lieux d’activités productives où perdurent d’anciens loisirs tenaces. Et la rencontre entre des esthètes visiteurs et ces « autres », chasseurs, pêcheurs, bergers ou agriculteurs-éleveurs peut tourner à la confrontation. Nous souhaitons évoquer la thématique des conflits d’usage qui opposent des arguments contrastés à « être là », entre l’autochtonie revendiquée et le principe d’universalité de la « nature ». Il s’agira, au travers de quelques exemples, d’aborder ces frottements entre différentes cultures de la nature et les discours qui servent à les rendre légitimes. Cela nous permettra aussi de nous interroger sur les droits et les limites du regard « savant » prétendant surplomber, au nom de la science, les argumentaires des locuteurs « profanes ».

 

13h45-14h15 : Pierre Alphandéry, Sophie Bobbé : Introduction

 

14h15-15h00 : Laurence Boutinot, Christophe Baticle

L’autochtonie reconnue des « Pygmées » et sa discussion locale en Afrique centrale : les enjeux matériels et symboliques d’une catégorisation internationale

Les populations qu’on dénommait naguère « Pygmées » font désormais l’objet d’une reconnaissance internationale au travers de leur intégration au sein des dits « peuples autochtones », mais également via les procédures de protection du patrimoine culturel immatériel et plus globalement ils bénéficient d’une image positive au titre de leur mode de vie, vu comme éco-friendly.

Mais sur les terrains de l’Afrique centrale, l’absence de population d’origine européenne ayant fait souche trouble l’opposition entre peuples autochtones et « autres ». Quant à la dimension de vulnérabilité qui est attachée à la définition de l’autochtonie, elle peut s’avérer relative dans un contexte de précarité généralisée.

En d’autres termes, c’est là où l’autochtonie pourrait apparaître comme la plus évidente qu’elle se trouve discutée. Nous viserons ainsi à montrer que subsiste une vulnérabilité culturelle vis-à-vis de laquelle la fantasmagorie occidentale fonctionne à plein. Aussi, l’enjeu in fine se situera sur les questions territoriales, ici la forêt. Car cette vulnérabilité matérielle doit beaucoup aux richesses des espaces sur lesquels sont installés les Ba’Aka : richesses économiques et environnementales dont ils sont de plus en plus souvent exclus.

15h-15h30 : Pause

15h30-16h15: Sergio Dalla Bernardina

« Je suis d’ici et je sais ce que je dis ». Vérités indigènes et mensonges ethnologiques (ou vice-versa)

Si l’ethnologue se rend sur le terrain, c’est bien pour recueillir le point de vue autochtone et le transcrire fidèlement. Plus il se lance dans des abstractions, plus il généralise, plus il objective, plus il trahit le sentiment de ses « informateurs ». C’est une manière de présenter les choses, mais il y en a une autre : elle part du présupposé que les acteurs sociaux sont par nature, donc par nécessité, enclins à l’oubli, à la transfiguration de leur histoire, à la répétition mimétique de la version officielle. En matière d’écologie, le décalage entre les témoignages contemporains et la réalité ethnographique qu’ils prétendent représenter est parfois évident. L’ethnologue qui, fort de sa documentation, remet en cause le discours ambiant (« Il y a trente ans, au sujet de la chasse, vous ne disiez pas la même chose … ») passe pour un original ou un dilettante, alors que, à sa manière, il contribue à raviver la mémoire locale.

16h15-17h00 : Hélène Melin

Les sentiers ruraux en Corse : entre usages traditionnels, ouverture au tourisme et réappropriations locales. Quelles légitimités de présence ? Le cas de la Balagne

Les sentiers en Corse sont nombreux et présents depuis toujours, permettant la communication entre villages, hameaux et plus largement micro-régions, pour des activités de commerce, l’activité agro-pastorale, de pêche, les sociabilités locales. Ils sont inscrits dans le territoire comme un marqueur culturel fort. Cependant, avec l’avènement du tourisme de masse à partir des années 1960, précédé dès le début du 20ème siècle d’une crise de l’économie traditionnelle et d’une émigration corse importante, les chemins ont peu à peu disparu, physiquement comme symbo-liquement, de l’imaginaire et des pratiques locales. Cette invisibilisation ne s’est cependant pas traduite par un arrêt total des usages de ces sentiers par une partie de la population, mais ceux-ci sont devenus marginaux. Parallèlement, la mise en tourisme de la Corse, via la création du GR 20 dans les années 1970, sentier de grande randonnée traversant l’île par ses montagnes, a contribué à l’arrivée de nouvelles pratiques excursionnistes exogènes, peu partagées localement. Jusqu’au début des années 2000, les pratiques récréatives sur les sentiers sont principalement le fait de visiteurs extérieurs à l’île sur des tracés longs et en dehors des foyers de peuplement.

Puis des habitants, individuellement ou organisés en association, réinvestissent des chemins de proximité, pour divers motifs. Ils contribuent peu à peu à une valorisation de ces tracés et des patrimoines ruraux associés, dont les acteurs politiques et institutionnels vont s’emparer pour opérer une nouvelle forme de mise en tourisme des lieux, dans une optique de soutenabilité de l’économie touristique et une diversification des périodes et des lieux fréquentés. Un foisonnement de projets et d’actions autour des sentiers est à présent constaté. Leurs formes et les acteurs engagés questionnent les sens accordés à ces chemins, leurs finalités et plus largement permet d’aborder la question de la préservation et de la visibilisation de la culture et de l’histoire corses versus celle de l’ouverture à l’autre. Se pose la question d’une légitimité de présence et d’action sur les chemins et on assiste à un processus marqué de « corsisation » des lieux et des usages, allant dans le sens d’une réappropriation – un riacquistu – des lieux.

17h-18h : Débat

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