lundi 10 août 2020

La mort animale et ses montreurs. Sommes-nous une bande d’opportunistes ?

 

Pablo Picasso, 1923. Enfant sur un "bien matériel facilement remboursable"*

 

Je passe mon temps à critiquer ceux qui, au nom du progrès moral, profitent de la souffrance animale pour attirer notre attention : « Regardez cet animal martyrisé. C’est impressionnant, n’est-ce pas ? Et regardez-moi. Ne suis-je pas merveilleux dans mon rôle de pourfendeur des ennemis des animaux ? ».

Il n’empêche que le chercheur aussi, à son tour, peut être accusé de profiter de la mort des animaux pour faire son intéressant, pour avoir finalement quelque chose à dire, quelque chose de sérieux et de solennel. Cette remarque, hélas, est légitime et je n’ai rien à objecter*.

Ma défense pourrait se baser sur le fait que d’habitude, pour représenter la scène sanglante, j'entrepose des filtres : un tableau ancien, une carte postale, une gravure, des légos. Mais les mots, on pourrait me rétorquer, ne sont pas moins évocateurs que les images. Bref,  je ne me sens pas plus noble ni moins ambigu  que les membres de la Fondation de Brigitte Bardot ou les militants du mouvement  L214.

Tout ce préambule pour sombrer moi aussi, pour une fois, dans la spectacularisation réaliste  de la mort animale.

Je renvoie donc au lien suivant : https://www.youtube.com/watch?v=N6dhJqA6u9U

C’est un clin d’œil aux amis des « super-prédateurs » qui étalent les corps ensanglantés des ours braconnés par les bergers ou les carcasses des loups surnuméraires éliminés en douce par les émissaires de l’État. Eux aussi, à l’époque des estives, ont beaucoup d’images à cacher.

 

* Pour reprendre les mots du ministre de l'Environnement italien à propos des tuéries d'ânes perpétrées par les ours. 

** Et je refuse l’argument : « Oui, mais moi je le fais au nom de la science, ou de la philosophie morale » qui est un argument, si l’on me permet la grossièreté, de faux-culs. J’aborde la question du voyeurisme du chercheur, entre autres, dans L’éloquence des bêtes (Métailié, 2006) (cf. le chapitre Des plaisirs du chasseur aux souffrances de l'écologiste - Violence et iconographie).

 

 

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