Touche pas à Déméter

 

Je viens de découvrir l’existence, au sein de la Gendarmerie nationale française,   d’un organisme appelé Déméter « la cellule nationale de suivi des atteintes au monde agricole ». Je cherche à reconstituer le parcours mental du fonctionnaire (mythologue et poète à temps perdu, manifestement), qui a choisi ce nom. Il a une culture classique, me suis-je dit, il a peut-être suivi les cours de Jean-Pierre Vernant ou prêté service  à côté de Paul Ricoeur … . Déméter est la divinité nourricière par définition. C’est elle qui dispense aux humains les plantes comestibles et les animaux. Les agriculteurs et les éleveurs sont ses émissaires. Toucher aux paysans c’est toucher à Déméter.

La déesse et ses pieux intermédiaires, malheureusement,  ont  des ennemis. Il s’agit des voleurs d’engins mécaniques, des écologistes qui, sous prétexte de photographier des irrégularités, pénètrent dans les champs et en sortent les poches pleines de courgettes, il s'agit des antispécistes  qui rôdent autour des abattoirs avec une grande envie d’y pénétrer. Tout le monde, dans ce bric-à-brac délibérément confus est logé à la même enseigne. Tout le monde, donc,  mérite d’être surveillé. C’est pratique. Aurais-je envie de documenter l’existence d’une décharge abusive, d’un élevage surpeuplé, d’une parcelle réservée aux essais transgéniques ? Et Déméter alors ? Et la mère nourricière ? Ah l’hérétique ! Ah le mécréant ! Montrez-nous vos papiers.

J’ai l’habitude de taquiner les écolo-intégristes et les amis des animaux en mettant en cause leur manichéisme, la violence latente qui souvent les anime, leurs contradictions* Je reste convaincu, cependant, que leur rôle est essentiel. Tenter de les intimider, de les décourager, est un acte grave, je dirais presque irresponsable (à suivre).

* Qui ne manquent pas chez moi, bien entendu.