C‘est la saison des champignons. Je les cueille avec plaisir et, très infantilement, j'aimerais être le seul. Voilà ce que j'écrivais il y a une dizaine d'années pour pousser mes antagonistes à rester chez eux :
« En fait, plusieurs facteurs tels que la mode du bio et des médecines
alternatives, la demande croissante des restaurants, la facilité des
déplacements, la paupérisation de certaines catégories sociales, sont à l’origine d’une véritable « fièvre du ramasseur », sorte de «
libido depraedandi » qui est en train de changer le statut même de ces
activités. Cette ardeur à la fois utilitaire et taxinomique (avant
d’engranger on reconnaît, on classe …) qui attire dans les fourrés une allègre compagnie de ramasseurs improvisés,
n’est pas sans effets collatéraux : pendant les premiers jours d’octobre
2010, pour ne faire qu’un exemple, l’hôpital Niguarda, à Milan,
spécialisé dans les intoxications alimentaires, a reçu 102 « dilettantes
» qui s’étaient trompés sur la famille des champignons qu’ils venaient
d’ingurgiter. Entre janvier et septembre de cette même année, 43
personnes ont trouvé la mort au cours du ramassage des champignons (18
dans les Alpes en 10 jours seulement). Il s’agissait de promeneurs
chevronnés, de villageois malchanceux mais aussi de banlieusards
inexpérimentés ou de retraités mal équipés que l’on a retrouvé au bas
d’une falaise ou dans le ravin où ils s’étaient égarés dans l’euphorie
de la « chasse au trésor » (sans parler des cibles de quelques
chasseurs s’étant trompé non pas de « famille », dans ce cas, mais d’ «
espèce »).
(Tiré de mon ouvrage : Le retour du prédateur. Mises en scène du sauvage dans la société post-rurale, PUR, 2011, p. 66-67).
C’est gagnant-gagnant finalement.
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