jeudi 6 février 2025

Entre tradition et postmodernité. 2) La Gnaga de Fornesighe

 


(Suite) Un masque, la  Gnaga, donne son nom au cortège carnavalesque de Fornesighe. C’est un masque insolite, qui condense en une seule pièce deux personnages : une vieille dame aux gros sabots qui porte sur son dos, dans une hotte, un jeune homme en pleine forme qui ne semble pas gêné du tout. Ça symbolise, parait-il,  la vieille année qui s’en va pour céder sa place à la nouvelle. Mais c’est aussi une représentation du monde à l’envers typique du carnaval* :  le jeune homme, en fait, profite sans raison des attentions normalement réservées aux vieillards. Avant d’aller à Fornesighe je me suis renseigné sur l’origine du masque. Si le cortège, comme on le présente officiellement, est « archaïque », le masque ne l’est que très faiblement, ce qui n’enlève rien à sa prégnance,  à son « mana », diraient les Mélanésiens. Il date de 1897 et on connait même les généralités de son inventeur, ce qui n'est pas très fréquent en matière de traditions ancestrales*.

Son nom aussi pose quelque problème, dans le sens qu’à Venise, avec le même appellatif, on désignait un masque tout à fait différent, représentant le museau d’une chatte. Ce déguisement était porté par les hommes qui, en l’endossant, étaient censés adopter un ton de voix plus aigu et des comportements féminins (l’inversion des identités, encore une fois). Bref,  la Gnaga des Dolomites a des origines assez confuses, donc bien accordées à l’esprit du carnaval. (À suivre)

Il s'appellait Valentino Toldo, dit Nin di Rosa, et c'est en Suisse, peut-être qu'il a trouvé sa source d'inspiration.

** Cela appartient clairement à la famille des adynata, pour employer le langage de Giuseppe Cocchiara.


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