dimanche 28 février 2021

La promenade des sangliers

 


Sanglier parisien (je l’ai immortalisé dans le quartier des Batignolles avant l’émergence de la pensée animaliste). Image tirée de mon ouvrage La langue des bois. L’appropriation de la nature entre remords et mauvaise foi, Paris Muséume d’Histoire Naturelle, 2020)

 

Tout le monde semble s’occuper des sangliers, cette année, et de leur souhait de vivre avec nous. Mais le problème n’est pas récent. Si à  Nice, en profitant de la pandémie, ces suidés omnivores se  reproduisent joyeusement, à Gènes, comme je le soulignais il y a dix ans, ils cohabitent peinards avec la partie la plus éclairée de la population urbaine. Et cette amitié interspécifique est  loin d’être la seule : 

“Nouveaux « mendiants » - j’écrivais -  les sangliers circulent en ville, nourris de spaghetti par des gens compassionnels.  Les ours polaires sont soignés par des dentistes alors que les chats et les chiens, encore plus proches de l’homme qu’ils l’étaient auparavant,  vont chez le psychologue et prennent du Prozac. Las de vivre dans les bois,  les piverts s’installent dans les maisons secondaires et creusent des trous dans les fenêtres  « à l’ancienne » (c’est ce qu’on appelle la multipropriété : lorsque les humains s’absentent les pivert réaménagent).  Grâce à la médiation des chiens  « Patou », le loup habite déjà ou presque avec l’agneau. Le paysan, dûment apprivoisé, ne s’oppose plus à l’ensauvagement  de ses terres (ici et là, il faut l’avouer, on trouve encore quelques poches de résistance, mais avec l’aide d’un bon négociateur …). Habillé en « vrai paysan » pour être plus photogénique,  faute de cultiver des terres de plus en plus en friche, il cultive son image et apprend aux touristes, qui le remplaceront bientôt (on les appellera les néo-ruraux), ses savoir-faire  ancestraux”. (Sergio Dalla Bernardina, Le retour du prédateur, Presses universitaires de Rennes, 2011), p. 122.

2 commentaires:

  1. Tout le monde devrait vous lire attentivement, y compris les chasseurs.
    Par mégarde, j’imagine, ils abattent aussi les sangliers domestiques.

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  2. C’est une belle histoire, en effet (je veux dire une histoire emblématique). Je compte en parler prochainement.

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