lundi 23 mai 2022

La comédie de l’innocence, la chasse et la guerre

 


 

Sacrifice païen (détail) . Image tirée de mon ouvrage "La langue des bois. L'appropriation de la nature entre remords et mauvaise foi. Paris, Muséum d'Histoire Naturelle, 2020

Si on me demandait  ce qu’il faut retenir des années que j’ai passées à réfléchir autour de l’anthropologie de la nature j’aurais deux ou trois propositions. Mes contributions sont d’abord des « médiations ». La principale, peut-être, concerne la centralité que j’ai donné à la notion, peu à la mode en France et encore moins en Italie, de « Comédie de l’innocence ». Je l’ai repérée en  1982 en lisant un ouvrage de Walter Burkert* et, à partir de ce moment, j’ai passé mon temps à tester son efficacité dans l’étude des comportements ritualisés. Utilisé, au départ, dans l’étude des sociétés « non-modernes », le schéma associé à la notion de  « comédie de l’innocence » peut fonctionner  comme un scanner  dans l’étude des comportements contradictoires du monde contemporain. Il permet  de lire sous l’angle « cynégétique » toute description (et toute justification) d’une conduite violente et d’une prise de pouvoir : de l’acte judiciaire à  l’acte de guerre. J’en parlais déjà dans L’utopie de la nature. Chasseurs, écologistes, touristes (Imago 1996). J’y suis revenu à plusieurs reprises,  et tout récemment dans La langue des bois. L’appropriation de la nature entre remords et mauvaise foi, Paris, Muséum d’Histoire Naturelle, 2020). J’en parlerai encore l’année prochaine, dans le cadre du séminaire De l’humain animalisé au vivant humanisé (EHESS)  en relisant un roman italien consacré à la dernière guerre mondiale comme s’il s’agissait d’un récit de chasse. 

* Walter Burkert, Homo necans. Antropología del sacrificio cruento nella Grecia antica. Torino, Boringhieri, 1981. Burkert emprunte cette notion à Karl Meuli, auteur suisse connu notamment dans le cercle « ésotérique » des historiens des religions.


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