samedi 20 août 2022

L’inquiétante étrangeté deuxième session (8). L’ami de la nature en magicien

 Danse incantatoire pour la réproduction des champignons

J’ironise sur les amateurs d’espèces exotiques mais j’en suis un. Tout dépend du sens que l’on met dans le mot « exotique ». À l’époque des Grandes expéditions, les explorateurs revenaient avec des beautés exotiques qu’ils plantaient dans leur jardin. Moi, c’est pareil : je fais de l'exotisme de proximité. J’ai mon jardin des explorateurs, tout comme les Brestois. J’ai commencé par un genévrier trouvé dans les hauteurs que j’ai installé en bas, tout près de la route. Son agonie a duré très longtemps, des années entières. Avec les cyclamens ça a mieux marché. En dépit de leur exil elles refleurissent tous les ans. Leur résilience atténue mes sentiments de culpabilité (fallait-il les laisser chez elles?*) et prouve que, parfois, on peut s'épanouir même loin de chez soi**.  J’ai déjà parlé de l'églantine. En revenant de mes  promenades en montagne, avec un geste plus proche de la magie que de la botanique,   je disperse partout la mousse des champignons que j’ai ramassés.  Je me sens ridicule mais je persiste. C’est pour me déculpabiliser. Comme beaucoup de mes contemporains, je simule des échanges et des restitutions avec le monde naturel parfaitement inefficaces qui feraient ricaner le primitif le plus superstitieux***.


*  Il y en avait beaucoup, me dis-je  pour justifier mon prélèvement,  même trop …

** En France, par exemple

*** Il ne faut pas dire « primitif », je sais.

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