mercredi 1 mai 2024

Fait divers et varié 2


(Suite) A sept heures du matin j’appelle mes amis « Excusez-moi pour cette incursion aurorale. Vous trouverez ça ridicule, il s’avère que etc .  … J’ai résisté presque deux heures mais je commence à avoir vraiment froid ». « T’inquiète pas, on arrive tout de suite ». Dans l'attente, le risque de voir surgir ma voisine dans la pénombre matinale augmentait considérablement. J’ai imaginé la stupéfaction de cette dame très réservée qui, malgré la meilleur volonté, n’aurait pas pu croire à mon histoire (« Je suis sorti en déshabillé pour régler un contentieux entre un prédateur et sa proie »).

Dans la cage d’escalier il y a aussi un placard. J’ai songé à y entrer en laissant juste une fissure pour surveiller son départ. Oui,  mais si elle apercevait dans le noir le reflet de mon œil ? Et si l’armoire se mettait à craquer ? Je me suis vu au commissariat. Pendant un court instant j’ai pensé à la vanité de mon geste (qu’allais-je voir, au juste, dans la rue ? Quel était mon but véritable ?)  et à la distance qui me sépare des chercheurs qui magnifient, avec un fatalisme de philosophes, l’installation des animaux sauvages dans l’espace urbain. J’ai pensé aussi, avec jalousie, à d’autres chercheurs « animaliers » : ceux  qui passent des moments fabuleux avec les grands prédateurs. Ils les pistent, ils les rencontrent, ils les regardent dans les yeux, ils s’apprécient mutuellement … C’est solennel et émouvant à la fois : de nobles chercheurs face à de nobles prédateurs.  Si dans la cour il y avait eu un loup, me suis-je dit, il m’aurait trouvé bien ridicule, avec mon caleçon approximatif et mes espadrilles rayées. Mais moi aussi, peut-être, je l’aurais trouvé bas de gamme. Quoi que l’on dise, tous les loups ne sont pas merveilleux. Il y en a même d’assez décevants. Maigrichons, par exemple, lâches et pas assez poilus – ces  pékins moyens de la race lupine qui ne méritent ni pistages ni narrations héroïques.

J’allais m’installer dans le placard lorsqu’une porte s’est ouverte. C’était mon ami, l’air souriant mais pas trop. J’ai compris tout de suite  que ce n'était pas la peine de lui proposer un café. Je l’ai beaucoup remercié et il est reparti. Tout s’est bien terminé, finalement. Reste à élucider l’énigme du tapage nocturne.


8 commentaires:

  1. Votre mésaventure, votre imagination ( un caleçon, un loup, il fait froid… ) avez-vous eu l’occasion de lire le tome 2 de la série “ le loup en slip” ( BD de Paul Cauuet, Wilfrid Lupano, Mayana Itoïz )… bonne lecture !
    Nicole Juin

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  2. Votre aventure me laisse dubitatif: les chercheurs "animaliers" sont-ils eux aussi équipés d'espadrilles rayées? Je n'y ait jamais prêté attention, mais c'est peut-être un accessoire essentiel au camouflage?... Allez savoir si votre voisine vous aurait repéré, si bien caché que vous êtiez! Hervé A.

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  3. Derrière mes espadrilles, en effet j’étais méconnaissable.

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  4. Quelle histoire passionnante… le dress code ( slip et espadrilles rayées) du parfait prédateur, pardon, du chercheur animalier . Dommage que vous n’ayez pas été pris d’une quinte de toux , je suis bien sûre qu’elle aurait été séduite…vous retenterez l’expérience au prochain « brame nocturne « 
    FMS

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  5. J’avais pensé à un loup, à un chat, à un sanglier et même à une fouine , mais l’hypothèse du cerf m’avait complètement échappé. Pour justifier ma présence, éventuellement, j’aurais pu dire à ma voisine : « Veuillez excuser ma tenue, mais il avait un cerf dans le garage … ».

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  6. Mais … C’est vous le spécialiste des animaux , c’est vous qui avez la science . Elle aurait bien du reconnaître votre hypothèse d’un cerf dans le garage.

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    1. On a beau s’expliquer, il y a des gens qui sont pleins de préjugés.

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