Chasse à la canardière sur un plan d'eau italien
Si le statut des animaux sauvages a changé - de simples ressources (ou de « nuisibles ») ils sont devenus des « non humains » - il n'empêche que même autrefois, pour les tuer, il fallait donner des explications. Pendant longtemps, deux stratégies discursives ont permis de justifier la mise à mort "gratuite" du gibier : la rhétorique amoureuse (la chasse/passion, la proie comme objet de désir) et la rhétorique militaire (la chasse comme duel entre nobles rivaux)*. L’article de Fanny Pacreau « Le lac de Grand-Lieu et ses oiseaux d’eau (Loire-Atlantique)»** nous offre deux beaux exemples d'héroïsation de la chasse au gibier d'eau.
Chez le baron Félix Platel qui dans les années 1880 décrit ses chasses à Grand-Lieu dans les pages du Figaro, la stratégie de légitimation consiste à magnifier la proie : « Au moment ultime, où il
saisit sa proie par le cou, l’oiseau devient colossal ». L’autre
expédient, tout aussi classique,
revient à emphatiser les dangers encourus « “Cette chasse où les bateaux vont
l’un sur l’autre est assurément dangereuse ”».
On pourrait paraphraser ce propos
par la formule : « Cette fois c’est le canard qui est mort, mais ça aurait bien pu être moi ».
* Je developpe ce thème, par exemple, dans L’utopie de la nature. Chasseurs, écologistes,
touristes, Paris, Imago, 1996. Cf aussi : « Sur qui tire le chasseur ?
Jouissances dans les bois », Terrain n. 67, pp. 168-185.
** De la bête au non-humain. Perspectives et controverses autour de la
condition animale (Sergio Dalla Bernardina dir.), édition numérique Collection « Actes des congrès nationaux
des sociétés historiques et scientifiques » 2020 (à paraître).
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