mardi 28 juillet 2020

Show must go on. Résidus sacrificiels dans un monde laïcisé*




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(Suite) La violence mimétique dont parle Girard est toujours aux aguets. Mais le versement de sang périodique assuré par l’immolation d’une victime émissaire n’est plus là pour la dissiper (même si on peut avancer que la messe, au bout du compte, remplit cet office). Nous avons alors trouvé d’autres moyens pour profiter des effets cathartiques d’une poursuite et d’une mise à mort. Par le recours au virtuel, bien évidemment**.  Mais ce virtuel ne date pas d’aujourd’hui.  Que l’on songe au succès, tout au long de notre histoire, des scènes de prédation (des graffitis du paléolithique  jusqu’aux documentaires contemporains). Que l’on songe au réalisme des peintres animaliers offrant à un public enthousiaste les blessures béantes  de lièvres, biches, sangliers … . Que l’on songe au plaisir avec lequel, dans le monde rural pré-écologiste, on sortait des maisons pour admirer les corps inanimés des proies ramenées par les chasseurs : quelqu’un a été lynché dans les bois, la violence a trouvé son exutoire, la sérénité revient. Dans ce sens c’est aux chasseurs, en quelque sorte – mais on pourrait dire de même pour les toréadors et autres administrateurs de la mort légitime*** - qu’on déléguait la fonction sacrificielle. (À suivre)



* À propos de la fête de l’Aïd-el-Kébir et de l’ouvrage « Faut qu’ça saigne. Sacrifice, écologie, religion, éd. Dépaysage, 2020 »

**La désignation d’un porteur de marques différenciatrices  qui sera zigouillé au cours du récit continue d’occuper une place centrale dans l’imaginaire cinématographique.
*** Je me limite à rappeler la fascination des foules pour les executions capitales décrite par  Piero Camporesi dans l'ouvrage La sève de la vie. Symbolisme et magie du sang, Paris, Le Promeneur Gallimard, 1990.

2 commentaires:

  1. Il y a une jalousie manifeste entre mes chats.
    L’un des deux est plus rapide depuis la naissance. Il l’est également pour avaler la nourriture.
    Il a eu un doute sur l’équité des quantités que je leur distribuais.
    Pour en avoir le cœur net, il s’est imposé deux ou trois fois dans la gamelle de son frère, qui a accepté placidement l’échange. Mais le résultat était le même. Quand il avait fini, l’autre avait encore un long moment de dégustation devant lui.
    Heureusement, ils ont aussi beaucoup de tendresse l’un pour l’autre.
    Croyez-vous que les oiseaux en paient le prix ? (au grand dam des chasseurs).

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  2. A vous lire aujourd’hui... « fait qu’ça saigne » ! Et bravo !

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