Chasse présidentielle de Georges Pompidou à Chambord (1970). Cliché, Musée de la chasse et de la nature repris dans mon ouvrage La langue des bois. L'appropriation de la nature entre remords et mauvaise foi, Paris Éditions du Muséum d'Histoire Naturelle, 2020
(Suite du billet précédent)
Ce qu’il faut reconnaître à Emmanuel Macron, dans sa relation avec les chasseurs, c’est qu’il n’avance pas masqué. Il renonce ouvertement à l’électorat anti-chasse, qui est consistant mais qui, de toute façon, ne voterait pas pour lui. Son herméneutique n’a rien d’improvisé*. Il connaît le discours des chasseurs, ses modulations rhétoriques et, en bon interprète, il les prend au pied de la lettre. Lorsque les chasseurs prétendent avoir toujours été écologistes, par exemple, il sait que ce n’est pas complètement vrai**. Mais ce serait triste de les décevoir. Et, de toute façon, c’est pour la bonne cause : le chasseur croit avoir été écologiste? Eh bien, il finira par le devenir***. Accusé de populisme par ses détracteurs, Macron en arrive même à défendre les chasses traditionnelles considérées par l’opinion publique, ainsi que par la Communauté européenne, comme particulièrement cruelles.
Je passe maintenant à gauche.
Une première donnée saute aux yeux : les candidats de gauche s’adressent au monde des chasseurs avec moins d’enthousiasme. Anne Hidalgo n’a pratiquement pas de point de vue. Philippe Poutou et Dominique Jadot se montrent frileux, en se limitant à proposer une série de restrictions. Nathalie Artaud est contre la chasse à courre, ce qui ne coûte pas grand-chose, et souhaite, à terme, la fin de la chasse en général ("là où il n’y a plus de raisons de se nourrir avec les animaux sauvages", c’est à dire partout).
Jean-Luc Mélenchon est particulièrement embarrassé. Il sait très bien, comme Valérie Pécresse, que le droit de chasse est une conquête de la révolution française et il ne peut pas s’aliéner la partie résiduelle des chasseurs des classes populaires qui votent à gauche. Mais ses propos officiels ne contiennent la moindre référence positive aux notions de patrimoine, de tradition, de savoir faire etc.
Seule exception à gauche, mais non sans nuances, celle de Fabien Roussel qui défend ouvertement les chasseurs et reconnaît leur rôle dans la préservation de l’environnement. Il en arrive même à proposer le maintien des chasses traditionnelles, tout en précisant qu’elles sont pratiquées par une minorité de vieillards qui vont bientôt mourir (À suivre).
* C’est un
disciple de Paul Ricœur …
** Le gibier, historiquement, était perçu comme un ennemi de l’agriculture (que l’on songe à la notion de « nuisible », ou de « vermine »). J’ai consacré plusieurs recherches à cet aspect.
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