Controverse animée autour de la notion de "tradition rurale"
(Suite du billet précédent)
Bref, en matière de chasse, on a beau généraliser, les identités sont nombreuses.
Je veux dire : les représentations mythiques de la chasse et de la ruralité sont nombreuses. Celles de la tradition aussi. Est-ce qu’elle peuvent ne pas entrer en conflit ? Reprenons l’exemple du Saint-Hubert Club de France, instance représentative de la tradition cynégétique. Ses membres ont des liens avec la ruralité, ne serait-ce qu’en tant que propriétaires terriens. Ils se réclament de la tradition, ce que personne ne peut leur contester. Il faut en même temps rappeler que le Saint-Hubert Club de France a été créé pour lutter contre le braconnage, à savoir, comme le diraient Edward Thompson ou Eric Hobsbawm*, contre ces pratiques rurales de défense des récoltes et d’accaparement des ressources spontanées qui entrent, traditionnellement, dans la catégorie : "braconnage".
Toutes les traditions ne se ressemblent pas, finalement.
Autre exemple : ces patriotes "Identitaires" qui voient dans l’utilisation des fusils de chasse l'heureuse résurgence des Templiers et leurs croisades, n’ont strictement rien à voir avec les "techniciens de l’environnement" qui ne chassent pas pour leur plaisir mais pour aider l’environnement qui a besoin d'un coup de main.
Comment surmonter ces divergences ? Dans le récit mythique, comme l’explique Lévi-Strauss, il existe un personnage qui permet d’assurer la médiation entre réalités inconciliables. Il s’agit du Trickster.
Dans la version qui nous est offerte par Paul Radin**, Le Trickster ne connaît pas le principe de non-contradiction. C’est un drôle de démiurge qui fixe les règles et, juste après, il s’empresse de les transgresser. Une scène célèbre, dans l’épopée du Trickster, est celle où sa main droite se dispute avec sa main gauche. On pourrait voir un avatar du Trickster chez Emmanuel Macron, qui cherche à plaire simultanément à un lobbyiste comme Thierry Coste, secrétaire général du Comité Guillaume Tell***, et aux derniers piégeurs d’alouettes aux pantes. Mais il y a un personnage qui, dans sa capacité à adopter les postures les plus hétéroclites, incarne encore mieux la figure du Trickster. J'en parlerai dans le prochain billet.
* Grands spécialistes de l’histoire sociale.
**Le Fripon divin: un mythe indien, 1958 ouvrage collectif avec Carl Gustav Jung, Paul Radin et Kerényi, éditions Librairie de l'Université, Georg et Cie.
*** C'est une belle trouvaille, je le reconnais (si on garde des armes à la maison, c'est pour défendre les Suisses). Et ça fait bien plus viril que les "Comités Jar Jar Binks" ou "Sancho Panza", qui d'ailleurs n'existent même pas.
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