A la naissance,
disait le philosophe John Locke, l'esprit humain est vierge comme une feuille
blanche. C'est l'expérience qui en détermine le contenu. J'ai eu un setter irlandais qui s'appelait Graf.
Dans sa jeunesse Graf était gentil et pacifique, un vrai démocrate. Un jour,
pendant une expédition avec mon père dans la plaine du fleuve Po, il disparut.
Il y a toujours du brouillard, là bas, et les chiens ont tendance à
disparaître. Mon père aimait ce chien, aussi publia-t-il des annonces dans la presse locale pour le retrouver. Après quelques mois d'attente il accepta la triste réalité. Pour ne
pas trahir son ancien compagnon il
acheta un setter anglais. Une année plus tard Graf réapparut. Il vivait du côté
de Rovigo, dans un élevage géré à la bonne franquette. En dépit de sa
médiocrité esthétique (par rapport aux standards officiels) il y remplissait
le rôle d'étalon. Ils étaient nombreux, dans l'établissement, à exercer cette fonction. A son retour chez nous il était devenu
un autre. Il hurlait, il mordait, il cherchait à s'accoupler avec n'importe qui
et n'importe quoi, il empêchait son copain d'approcher de la gamelle. Dans la
rue, il fonçait sur les autres chiens.
J'aime beaucoup la progression de votre billet et sa chute.
RépondreSupprimerRien à voir (quoique...), mais avez vous vu ou entendu parler du film récent The Lobster ? Je l'ai vu il y a quelques jours et j'ai pensé à vous, car je crois qu'il pourrait vous offrir matière à réflexion. L'intrigue se situe dans une sorte de dictature où ceux qui ne sont pas en couple sont transformés, au bout d'un laps de temps plutôt court, en l'animal de leur choix.
J'ai entendu parler de ce film il y a quelques jours. J'écoutais "Le masque et la plume", je crois, et je me suis dit la même chose : cela mérite une réflexion. Je me suis souvent demandé à quel animal je ressemble mais je n'ai pas trouvé de réponse satisfaisante (lorsqu'il s'agit des autres c'est toujours plus facile). Tant qu'à faire, de toute façon, j'aurais envie de changer.
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