Otto Dix, Fleischerladen, drypoint, 1920
De quoi je me mêle?
A la différence d’un certain nombre de mes concitoyens que je vois sortir de l’Église
Saint-Louis le dimanche en me rendant au marché, je n’ai pas de grands liens
avec la papauté. Il n’empêche que le pape actuel m’est plutôt sympathique. L’autre
jour il a fait une sortie spectaculaire : « Vous me demandez ce que
je voulais devenir quand j’étais petit ? Eh bien, je vais vous faire rire :
je voulais devenir boucher. » Il a regardé en souriant les Pueri Cantores qui étaient venus à sa
rencontre. Il goûtait d’avance leur rire joyeux. Mais ce rire s’est fait
attendre. Et il était plutôt faible, presque de complaisance. La caméra s’est
attardée sur un groupe de jeunes chanteurs (ils étaient 6.000, âgés de 5 à 28
ans). Ils étaient embarrassés, comme si le Pontife avait laissé échapper une
bêtise ou, pire encore, comme si le diable avait parlé par sa bouche. En
personne intelligente, le Saint-Père a tout de suite relativisé : « Oui
je sais, les idées maintenant ont changé… » Mais la chose était dite. « Ça
alors, un homme si vénérable, le représentant même de la chrétienté... Comment
peut-il ne serait-ce que nommer cet ignoble métier ? Ne prévoit-on pas l’enfer
pour les bourreaux ? N’y a-t-il pas de contradiction entre le message des Évangiles
et la souffrance animale ?» Les questions de cet ordre, manifestement, ne
touchent pas le Pape. Dans son esprit, être boucher et aller au Paradis sont
deux choses tout à fait compatibles.
Loin d’être contradictoire,
en fait, ce Pape est très cohérent. Tout en professant un écologisme
franciscain*, il n’a pas oublié que le Nouveau Testament a été conçu dans une
civilisation pastorale et que les bergers, à la différence de leurs brebis, mangent
de la viande. Certes, on peut considérer le christianisme comme un crédo à
géométrie variable et modifier son architecture au fur et à mesure qu’elle
cesse de nous convenir. On pourrait, par exemple, remplacer les victimes
animales évoquées dans les Saintes Écritures par des offrandes végétales. Dans la prière Agnus dei qui tollis peccata mundi - c’est une modeste suggestion -
on pourrait remplacer l’agneau sacrificiel par un concombre ou un potiron. Cela
perdrait un peu de sa charge mystique, probablement, mais ce serait sans doute
moins sanglant.
La performance du pape, dans le monde des
antispécistes, a suscité quelques réactions endiablées. Cf. par exemple la
video : Papa macellaio. Ci è riuscito benissimo!
- YouTube
* Je reviendrai sur
ce point
La vidéo que vous nous indiquez est très drôle quand on ne comprend pas l'italien, mais elle donne le mal de mer.
RépondreSupprimerIl n'y aurait donc plus qu'un pas au concombre masqué pour symboliser Jésus... Berger et agneau à la fois, bien que s'entourant de pêcheurs, il a changé l'eau en vin, multiplié le pain et les poissons, mais point de gigots ni de côtelettes. C'est dans l'Ancien Testament que Dieu est très viande, et ça rend Caïn assez féroce, bien que porté sur les végétaux.
Ce qui semblerait donner une légitimité néotestamentaire à la formule "Non à la chasse, oui à la pêche".
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