samedi 4 septembre 2021

L'inquiétante étrangeté 25. La vigne vierge

 

 

Certains Golems se développent verticalement, d’autres horizontalement. D’autres encore, sont à l'aise partout. J’ai toujours été fasciné par les maisons drapées d'un rideau de vigne vierge*. Je les imagine habitées par des gens civilisés, comme Rudyard Kipling ou Jane Birkin. Des gens polis,  mais qui n’ont pas renoncé à leur côté sauvage. Et je songe à ces heureux propriétaires comme s’ils étaient recouverts eux aussi de verdure :   des Feuillus, des Jack in the Green **  assis dans un décor victorien devant une tasse de Darjeeling. Des sauvageons raffinés. Des oxymores vivants. 

C’est donc avec entrain que j’ai planté de prometteuses pousses de Vite americana pour dissimuler un muret peu bucolique.   Malgré son nom trompeur (Parthenos = vierge) Parthenocissus quinquefolia est très prolifique***.  Les pousses ont maintenu leur promesse. Elles ont vite recouvert le muret en béton et caché pudiquement sa modernité.  Le problème est que, là où je les avais plantées, surgissait déjà un pied de vigne qui n’était pas vierge du tout.  C’était la vigne archétypale, celle des ancêtres de nos ancêtres. Elle règnait sur les lieux  bien avant notre arrivée.

 

* Jean Nouvel n’a rien inventé, Christo non plus (je plaisante, j'ai le plus grand respect pour l'architecture et l'art contemporains).

** Personnages du folklore européen revêtus de feuilles.

*** Le botaniste scrupuleux me rappellera la notion de « parthénogénèse »

 

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